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101 magistrats de tribunaux administratifs, cours administratives d’appel et de la Commission nationale du droit d’asile ont été recrutés sur 2024.
Le rapport public du Conseil d’État sur l’activité juridictionnelle et consultative des juridictions administratives en 2024 permet d’abord de se représenter l’activité de ces magistrats :
- Environ 600 000 litiges enregistrés sur l’exercice 2024 (+ 8 %), dont 280 000 enregistrés par les seuls tribunaux administratifs1 ;
- Une durée moyenne prévisionnelle de jugement de onze mois pour les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, cinq mois à la Commission nationale du droit d’asile (CNDA) et six mois au Conseil d’État ;
- Près de 1 300 magistrats et plus de 2 000 agents de greffe et soutien dans les tribunaux administratifs, cours administratives d’appel et de la CNDA. Environ 240 membres du Conseil d’État et 400 agents de soutien.
- Des affaires constituées pour près de la moitié par le contentieux des étrangers, suivi du contentieux des agents publics, du logement, des aides sociales.

Les modes d’accès à la fonction de magistrat des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel
Les concours
Deux concours permettent d’accéder à la fonction de conseiller (article L. 233-2 du code de justice administrative) :
- Le concours de l’Institut national du service public (ex-École nationale d’administration) pour les élèves formulant ce choix à la fin de leur scolarité. Relativement minoritaire : environ 10 % des entrées dans le corps ;
- Par un concours direct (externe ou interne), devenu la voie normale d’accès : environ 50 % des entrées dans le corps ;
- Le concours externe : ouvert aux titulaires de l’un des diplômes exigés pour se présenter au concours externe d’entrée à l’Institut national du service public (niveau licence) ;
- Le concours interne : pour les agents publics, civils ou militaires, ainsi que les magistrats de l’ordre judiciaire justifiants, au 31 décembre de l’année du concours, de quatre années de services publics effectifs.
Si votre souhait est de devenir magistrat, vous n’avez pas d’intérêt à passer le concours de l’Institut national du service public (sauf à vouloir multiplier vos chances) :
- La sélectivité est plus élevée au concours de l’Institut national du service public2 ;
- La formation est nettement plus longue (deux ans, contre six mois pour le concours direct) et
- La diversité des postes proposées à l’issue de la formation constitue un aléa.
Le tour extérieur
Il existe plusieurs procédures de recrutement au « tour extérieur »3 :
- Celle de l’article L. 233-3 du code de justice administrative, qui offre accès au grade de conseiller pour :
- Les fonctionnaires civils ou militaires justifiants d’au moins dix ans de services publics effectifs dans un corps ou un cadre d’emplois de catégorie A ;
- Les magistrats de l’ordre judiciaire.
- Celle de l’article L. 233-4 du même code, qui offre accès au grade de premier conseiller pour les cadres supérieurs des trois fonctions publiques justifiant d’au moins huit ans de services effectifs dans les corps listés4.
Chaque année, le vice-président du Conseil d’État détermine le nombre d’emplois à pourvoir au titre du L. 233-3 et du L. 233-4 précités.
Concrètement, l’essentiel des candidats et des nommés relève de la catégorie 1.1 : attachés d’administration (des trois versants), inspecteurs des finances publiques, etc.
Le tour extérieur concerne environ 15 % des entrées annuelles dans le corps.
Le détachement (qui peut être suivi d’une intégration)
Pour les corps suivants, il est possible de solliciter un détachement en qualité de conseiller ou de premier conseiller :
- Les fonctionnaires recrutés par la voie de l’Institut national du service public ;
- Les professeurs et maîtres de conférences titulaires des universités ;
- Les administrateurs des assemblées parlementaires et
- Les fonctionnaires civils ou militaires de l’État, de la fonction publique territoriale ou de la fonction publique hospitalière appartenant à des corps ou à des cadres d’emplois de niveau équivalent à celui des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel5.
S’ils satisfont aux critères des articles L. 233-3 et L. 233-4 précités, ils peuvent alors demander l’intégration dans ce corps ; aux grades de conseiller ou de premier conseiller.
Le détachement est le mode d’accès le plus aisé pour les corps précités. La procédure formelle de sélection au tour extérieur étant nettement plus lourde et complexe.
22 % des entrées dans le corps se font par la voie du détachement, qui est donc un instrument important de gestion.
Ce haut niveau témoigne également de l’attractivité de ce corps.
En synthèse

Les épreuves du concours d’accès au grade de conseiller (concours direct)
L’ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme de l’encadrement supérieur de la fonction publique de l’État a abrogé l’article L. 233-6 consacré au « recrutement direct ».
Pour autant, la partie règlementaire du code de justice administrative continue d’y faire référence et fixe plusieurs principes.
Tout d’abord, deux règles importantes :
L’impossibilité de se présenter plus de trois fois au concours (R. 233-9)6 et le caractère éliminatoire de toute note inférieure à 5 (R. 233-11)
La composition du jury
Celle-ci est prévue par l’article R. 233-8 du code de justice administrative :
- Le chef de la mission permanente d’inspection des juridictions administrative (président du jury) ;
- Un représentant du ministre de la justice ;
- un représentant du ministre chargé de la fonction publique ;
- Deux professeurs titulaires d’université et
- Deux membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel7.
La diversité des professionnels représentés témoigne du haut niveau de compétences attendu.
Les épreuves d’admissibilité et d’admission
Les trois épreuves d’admissibilité (1° du R. 233-11 du code de justice administrative) :
- L’étude d’un dossier de contentieux administratif (quatre heures, coefficient 3). L’épreuve la plus déterminante ;
- Une épreuve constituée de (en général, quatre) questions portant sur des sujets juridiques ou administratifs appelant une réponse courte (une heure et demie, coefficient 1) ;
- Une dernière épreuve (quatre heures, coefficient 1), suivant l’origine des candidats :
- Concours externe : dissertation portant sur un sujet de droit public ;
- Concours interne : note administrative portant sur la résolution d’un cas pratique posant des questions juridiques.
Deux épreuves d’admission :
- Une épreuve orale portant sur un sujet de droit public suivie d’une conversation avec le jury sur des questions juridiques (trente minutes de préparation et trente minutes d’échanges, coefficient 2) ;
- Un entretien avec le jury portant sur le parcours et la motivation du candidat (vingt minutes, coefficient 2).
Le programme des épreuves
L’étude d’un dossier de contentieux, la dissertation portant sur un sujet de droit public (concours externe) et le programme de sujets de droit public tirés au sort par les candidats lors de la première épreuve d’admission portent sur les sujets suivants :
Quelques éléments fondamentaux de droit public :

Le droit constitutionnel :

Le droit administratif :

Le contentieux administratif :

Les sujets pouvant susciter des questions à réponses courtes ou à une discussion juridique avec le jury portent sur les sujets suivants :
La gestion des administrations :

Quelques éléments sur les grandes politiques publiques :

Le droit de la fiscalité :

Enfin, des notions fondamentales de :
- Droit civil et de procédure civile ;
- Droit pénal et de procédure pénale.
- 200 000 pour le tribunal du stationnement pays, 56 500 pour la Cour nationale du droit d’asile, 31 500 pour les cours administratives d’appel et 9 500 pour le Conseil d’État. ↩
- Environ 6 % au titre du concours externe pour 2023, contre 10 % pour le concours externe direct. Pour le concours interne, le constat est plus nuancé, le taux de sélectivité étant d’environ 10 % à l’INSP, contre 12 à 13 % pour le concours interne direct. ↩
- Le recrutement au tour extérieur est un recrutement sur dossier, après audition des candidats. De solides références juridiques et un parcours professionnel de haut niveau sont évidemment requis. ↩
- Fonctionnaires de l’INSP, fonctionnaires de catégorie A ou cadre d’emplois de même niveau et titulaires de l’un des diplômes exigés pour se présenter au concours d’entrée de l’INSP, magistrats de l’ordre judiciaire, professeurs et maîtres de conférences titulaires des universités, administrateurs territoriaux, personnels de direction des établissements de santé et autres établissements (directeur d’hôpital et directeur d’établissement sanitaire, social et médico-social). ↩
- En pratique, cela recouvre les corps cités à l’article L. 233-4 de la note de bas de page précédente. Le Conseil d’État est chargé d’établir la liste. ↩
- On peut s’interroger sur la portée de cette disposition attachée à un article abrogé. Ici, le concours de magistrat administratif se distingue de celui de juge judiciaire où le nombre de passage n’est pas limité. Régulièrement des élèves de l’Ecole nationale de la magistrature ont ainsi passés plus de trois fois le concours avant d’être admis. ↩
- Nommés par arrêté du vice-président du Conseil d’État, sur proposition du Conseil supérieur des tribunaux administratives et des cours administratives d’appel. ↩