Le rapport de France stratégie sur l’attractivité de la fonction publique (vol. 6)
Temps de lecture : 7 minutes.
Suite de l’analyse du rapport de France stratégie sur l’attractivité de la fonction publique avec une analyse de deux éléments concomitants (et complémentaires) :
La concurrence accrue du secteur privé pour le recrutement de jeunes diplômés ;
La difficulté concomitante des universités à attirer de nouveaux profils, en particulier parmi les garçons.
Une fonction publique très féminisée
Ce caractère genré concerne les trois fonctions publiques et presque toutes les catégories
La féminisation des trois fonctions publiques est indéniable :
La fonction publique hospitalière est composée à 90 % de femmes (notamment du fait du poids des effectifs d’infirmières et d’aides-soignantes) ;
La fonction publique territoriale a un poids relativement stabilisé autour de 60 % ;
Enfin, la fonction publique d’État présente la spécificité d’une féminisation continue, y compris sur les dernières années.
Dans les trois versants de la fonction publique, la féminisation concerne toutes les catégories d’emploi, à l’exception de l’encadrement supérieur (les A+, voir notamment l’article sur les ministères économiques et financiers) et des catégories B du ministère de l’Intérieur (gendarmes, policiers) et des Armées1.
On peut souligner que ce point concerne en apparence toutes les grandes économies, avec une élévation du niveau scolaire des filles. Ce qui implique un intérêt plus élevé de ces dernières à rejoindre le secteur public, traditionnellement plus éduqué que le secteur privé.
Outre l’encadrement supérieur et les métiers régaliens, une part de femmes encore insuffisante dans les métiers informatiques
La fonction publique ne se distingue malheureusement pas du secteur privé dans la féminisation du personnel informatique.
Compte tenu du vivier de professionnels, par ailleurs souvent très éduqués, on aurait pu s’attendre à une féminisation plus élevée. Il n’en est donc rien :
Des agents publics toujours très diplômés par rapport au secteur privé
Le niveau de diplôme est substantiellement plus élevé dans le secteur public
« En 2022, 57 % des agents publics détiennent un diplôme du supérieur, contre 42 % dans le secteur privé. »
Ce niveau de diplôme est toutefois très hétérogène selon les fonctions publiques :
76 % des agents de la fonction publique d’État détiennent un diplôme du supérieur2 ;
Depuis 2007, la fonction publique peine à recruter des jeunes diplômés
Des recrutements de jeunes en diminution
Le nombre de « jeunes débutants » (sortis de formation initiale trois ans auparavant) baisse de façon continue depuis plusieurs années :
84 % des jeunes diplômés sont employés dans le secteur privé en 2019, contre 16 % dans le secteur public.
Depuis 2007, le taux d’emploi des « jeunes débutants » dans le secteur privé est en hausse de trois points, contre une baisse équivalente pour le secteur public.
« Cette moindre attraction affecte surtout la fonction publique d’État qui offre moins d’opportunités d’emploi sur cette période, avec une baisse marquée de ses effectifs. »
Parmi ces jeunes, une chute plus problématique encore du nombre de diplômés du supérieur
Depuis plusieurs années, les jeunes diplômés du supérieur se tournent davantage vers le secteur privé :
De 2007 à 2019, leur nombre a crû de 17 % dans le secteur privé et chuté de 29 % dans le secteur public.
L’écart de recrutements est encore plus flagrant lorsqu’on s’intéresse aux plus diplômés : ceux détenteurs d’au moins un bac +4 :
De 2007 à 2019, les effectifs de jeunes débutants diplômés de niveau bac +4 et plus ont augmenté de 63 % dans le secteur privé et baissé de 2 % dans le secteur public.
Les diplômes préparés pour rejoindre la fonction publique se distinguent du secteur privé
En effet, la fonction publique dispose de spécificités dans les diplômes du supérieur recrutés :
6 % des jeunes diplômés de la fonction publique relèvent de filières relevant des mathématiques, de l’ingénierie et des systèmes, contre 29 % pour le secteur privé4 ;
15 % des jeunes diplômés de la fonction publique relèvent de formation en gestion, contre 37 % dans le privé5.
Inversement, les jeunes diplômés du supérieur recrutés dans la fonction publique sont nettement plus souvent issus :
De filières en sciences humaines et sociales6, dont est issue une grande partie du corps enseignants et
De filières en sciences du vivant et de la terre7, dont sont issus les professionnels de santé.
Les « viviers traditionnels » des sciences du vivant et des sciences sociales peinent eux-mêmes à attirer les étudiants
Or, ces deux filières, sciences du vivant et sciences humaines et sociales, sont en difficulté. Elles peinent à attirer de nouveaux étudiants à hauteur des besoins :
Cette baisse d’attractivité est toutefois généralisable à l’ensemble de la sphère universitaire
L’ensemble des filières universitaires, qu’elles aient ou non traditionnellement la fonction publique comme débouché de prédilection, voient leur part relative s’affaiblir, face à la concurrence de l’enseignement supérieur privé.
Les rapporteurs soulignent également l’effet de l’introduction d’une sélection à l’entrée en Master 1 dans les universités à compter de 2017 (devenue définitive en 2020) :
Les projections réalisées par le SIES8 montrent que l’attractivité supérieure de l’enseignement supérieur privé devrait se prolonger, au détriment des universités :
« Les effectifs des étudiants inscrits à l’université en 2031 devraient être comparables à ceux de 2021 (en très légère baisse, de 0,1 % entre 2021 et 2031) alors que l’ensemble des inscrits de l’enseignement supérieur devrait connaître une hausse de 1,5 %. »
Certaines professions sont très concernées par cette diminution du vivier de recrutements : les professeurs, les cadres administratifs et les inspecteurs
La situation est encore plus problématique pour les étudiants en master des métiers de l’enseignement (qui prépare au concours d’enseignement du premier degré) :
Pour les catégories A, dont les besoins sont pourtant importants sur les années à venir, l’effondrement des effectifs en Institut de préparation à l’administration générale (IPAG) est également très inquiétant :
« Indépendamment du niveau d’études, les effectifs d’étudiants inscrits dans un IPAG ont ainsi presque été divisés par deux entre 2008 et 2016, avant de se stabiliser. »
Cette baisse n’est pas due à une diminution des effectifs, mais bien à un choix des étudiants :
Mais ces effectifs régaliens connaissent également une féminisation croissante, bien que plus tardive. ↩
33 % des agents publics de l’État ont un niveau licence ou master 1, contre 11 % dans le privé. 31 % ont un master 2 ou un doctorat contre 15 % dans le privé (Rapport annuel de la DGAFP de 2024). ↩
La fonction publique territoriale accueille plus d’actifs peu diplômés que le secteur privé : 15 % de ses agents sont sans diplôme ou titulaires d’un diplôme de niveau CEP ou brevet des collèges, contre 14% des salariés du privé. 30 % d’un diplôme de niveau CAP, BEP ou équivalent, contre 21 % dans le privé (Rapport annuel de la DGAFP de 2024). ↩
Inclut notamment les mathématiques, les technologies numériques, industrielles et du bâtiment. ↩
Inclut notamment l’économie, le droit, les finances et le secrétariat. ↩
Inclut notamment la philosophie, l’histoire, la psychologie, la littérature et la géographie. ↩
Inclut notamment le sanitaire et social, la physique, la chimie et les sciences de la vie et de la terre (y compris agronomie et agriculture). ↩
SIES (2023), « Projection des effectifs dans l’enseignement supérieur pour les rentrées de 2022 à 2031 », Note d’information du SIES, n° 2023-04, avril. ↩
Le rapport de France stratégie sur l’attractivité de la fonction publique (vol. 5)
Temps de lecture : 4 minutes.
Nouvelle analyse du rapport de France stratégie sur l’attractivité de la fonction publique avec un regard centré sur les besoins en recrutements :
Au niveau global, les trois fonctions publiques confondues ;
Les différences entre les fonctions publiques ;
Les différences avec le secteur privé et les spécificités au sein de ces fonctions publiques.
La fonction publique dans l’emploi total
En 2019, un travailleur sur cinq est un agent public de l’un des trois versants de la fonction publique :
9 % travaillent pour la fonction publique d’État (professeurs, policiers, militaires, inspecteurs des finances publiques, douanes… agents administratifs) ;
7 % travaillent pour la fonction publique territoriale ;
5 % travaillent pour la fonction publique hospitalière.
Une relative concentration des emplois sur certaines familles professionnelles
La notion de familles professionnelles
La nomenclature des familles professionnelles a été créée dans les années 80 par la direction statistique du ministère du Travail en rapprochant les statistiques de l’INSEE de celles gérées par l’opérateur chargé du placement dans l’emploi (désormais France travail).
Une famille professionnelle réunit des métiers présentant des niveaux de qualification identiques et relevant de compétences professionnelles proches.
Les métiers publics et les familles professionnelles
20 familles professionnelles (sur 83) couvrent la quasi-totalité de l’emploi public (93 %), le secteur public présente donc une concentration des emplois sur certaines familles professionnelles.
Les besoins de recrutement des trois fonctions publiques : État, territoriale et hospitalière
Le déséquilibre général ne semble pas insurmontable, bien que des divergences existent entre les fonctions publiques
Les besoins de recrutements de la fonction publique prise au global ne sont pas inquiétants. Toutefois, la situation diverge entre catégorie d’employeurs :
La fonction publique d’État occupe une position relativement favorable, ses besoins de recrutements étant plus faible ;
La fonction publique hospitalière devrait être confrontée à un « déséquilibre modéré », compte tenu d’un nombre de jeunes professionnels importants en début de carrière. L’enjeu du secteur hospitalier tient à la fidélisation de son personnel ;
L’analyse par métier peut être également préoccupante
Lorsqu’on regarde les déséquilibres par famille de métiers, le constat global apparaît plus nuancé, avec de vraies spécificités selon les métiers :
« Le besoin en cadre B et A est par exemple très problématique. »
« Dans ces métiers, les effectifs de jeunes débutants devraient être insuffisants pour remplacer les nombreux postes laissés vacants par les seniors ou nouvellement créés. »
L’analyse par besoins de recrutements dans les familles de métiers n’exclut pas un recoupement par employeurs, avec de nouvelles divergences pour des qualifications pourtant similaires :
Le cas spécifique des collectivités territoriales
Une population vieillissante, confrontée à d’importants départs en retraite
Sur les besoins au titre des départs en retraite :
« Les collectivités territoriales devraient être confrontées à des départs massifs : plus d’un tiers de leurs postes seraient laissés vacants par les seniors, soit une augmentation de 6 points de pourcentage par rapport à la décennie passée (2008-2019). »
Trois familles professionnelles représentent près de la moitié de l’emploi des collectivités territoriales :
Les agents d’entretien (éboueurs, nettoyage de locaux, petit entretien, etc.) ;
Les employés administratifs de la fonction publique (officier ou officière d’état civil par exemple), et
Les professions intermédiaires administratives de la fonction publique (gestion financière et des ressources humaines par exemple).
Des besoins importants du fait de l’évolution de la société
A ces départs en retraite plus élevés que dans le privé répond des besoins également plus élevés que dans le privé :
Comme énoncé en introduction du rapport de France stratégie, différents éléments se conjuguent comme l’emploi des femmes et entraînent une augmentation des besoins sociaux auxquelles les collectivités et le secteur hospitalier devront répondre :
« Le vieillissement de la population implique des besoins de santé et de services de maintien à domicile des personnes âgées en perte d’autonomie en forte augmentation : on compte entre 275 000 et 490 000 seniors supplémentaires en situation de dépendance entre 2020 et 2030 selon les scénarios de la DREES1. »
En conséquence :
« Ce sont dans les collectivités locales que la part des besoins de recrutement devra être – en pourcentage de l’emploi 2019 – la plus importante des secteurs publics et privé. Leur dynamique passée d’emploi a été plus forte que dans les autres versants en raison notamment des transferts de compétences qui ont accompagné les lois de décentralisation. Prolongée à 2030, cette tendance aboutirait à une création d’emploi du même ordre de grandeur que dans le reste de l’économie. Si on l’ajoute aux départs très nombreux des seniors, quatre postes actuels sur dix devraient être à pourvoir d’ici 2030, contre trois sur dix en moyenne. »
Et peu de jeunes pour y répondre
La problématique essentielle des collectivités tient en effet au vivier : peu de jeunes sont intéressés et ont réalisé un cursus scolaire les destinant à rejoindre le secteur territorial.
DREES 2024, protection et besoins des populations âgées dépendantes entre 2015 et 2050. ↩
Le rapport de France stratégie sur l’attractivité de la fonction publique (vol. 3)
Temps de lecture : 8 minutes.
L’emploi public ne cesse d’augmenter, pourquoi ?
L’augmentation des besoins en agents publics tient à plusieurs explications :
Un vieillissement de la société : les plus de 60 ans représentant aujourd’hui près de 28 % des Français (et les plus de 75 ans : 10 %) contre 18 % (et 6 %) quarante ans plus tôt ;
Un nombre de jeunes encore élevé : le nombre de jeunes de moins de 20 ans (et notamment ceux de moins de 15 ans) auxquels sont associés des besoins de services d’éducation oscillent autour de 15,5 millions depuis le début des années 1990 (contre 16,5 millions durant les années 1970 et 1980)1 ;
La poursuite de l’augmentation du taux d’activité des femmes, ce qui induit de nouveaux besoins dans le secteur des services – en particulier dans l’accueil des jeunes enfants et les services à la personne.
Enfin, le choix de l’emploi public pour répondre à tous ces défis.
Une augmentation générale de l’emploi dans les secteurs public et privé
Outre les spécificités tenant au secteur public esquissées dans le paragraphe précédent, il convient de relever que l’augmentation du taux d’emploi et du nombre de personnes en activité est générale :
Sur les trente dernières années (1991-2022), l’emploi total, public et privé, a progressé plus vite (+28 %) que la population active (près de 20 %), compte tenu de la baisse marquée du taux de chômage.
Mécaniquement, l’emploi public est donc également en hausse :
Des créations d’emploi dans le privé plus élevées sur la période récente
Jusqu’à une période récente, l’emploi public connaissait une dynamique plus forte que le secteur privé. Toutefois, depuis le début des années 2000, le secteur privé a été plus dynamique grâce à une forte accélération des créations d’emploi.
La croissance du secteur privé n’est pas linéaire, contrairement à celui du secteur public. Néanmoins, le taux de croissance annuel moyen du secteur public, souvent supérieur à 1 % avant 2005, est autour de 0,5 % depuis cette date, avec parfois des destructions d’emplois.
Le cas spécifique des ingénieurs informatiques : un recul dans le secteur public à rebours des évolutions du secteur privé
Si le nombre d’agents publics est globalement en hausse continue, il convient de relever une anomalie : celle des ingénieurs informatiques.
« La part de ces emplois n’a cessé de croître sur le marché de l’emploi, passant de 2,73 % en 2009 à 4,6 % en 2023. En revanche, cette croissance de l’emploi ne se constate pas dans le secteur public, y compris pour le métier d’ingénieurs de l’informatique. Leurs effectifs y ont même baissé alors que pour la même période ils augmentaient pour les actifs du secteur privé. »
En conséquence, les services informatiques sont très largement externalisés dans le secteur public
Au premier semestre 2022, pour l’activité courante des ministères, le taux d’externalisation variait ainsi de 25 % à 75 % selon les ministères.
Pour les grands projets informatiques, le taux médian était de 60 %, variant de 0 % à 93 %. Un quart des projets dépassait un taux de 75 %. En conséquence, les dépenses d’externalisation de l’État ont crû régulièrement depuis 2018.
Le positionnement de la France sur la scène internationale en matière d’emplois publics
La place de la France en termes d’emplois publics se situe : dans une « moyenne haute », sans être atypique.
Toutefois, en comme l’a récemment souligné l’OCDE, les comparaisons internationales sont délicates. En Allemagne, par exemple, la santé est financée par l’impôt, mais de nombreux emplois ne sont pas comptabilités comme « public » car les paiements sont indirects.
« Si la France a une dépense publique élevée, c’est d’abord en raison d’une forte mutualisation des risques sociaux et de prestations sociales élevées. En revanche, en termes de dépenses publiques de fonctionnement, et d’emploi public, la position de la France n’apparaît pas particulièrement atypique2. »
La féminisation de la fonction publique
Le rapport cite notamment les travaux de Cédric Hugrée et Sybille Gollac qui tendent à démontrer que le développement de l’État social et du secteur public a été central dans l’accès des femmes au salariat. Et, il l’est encore davantage dans l’accès des femmes au salariat qualifié dans la deuxième moitié du XXe siècle.
« Sur les 6,4 millions d’emplois supplémentaires entre 1960 et 2017, 5,9 millions sont occupés par des femmes. »
La longue marche des femmes vers le salariat au cours du XXe siècle
La part des femmes parmi les agents publics augmente fortement tout au long du XXe siècle, en commençant par les catégories d’exécution et les cadres intermédiaires :
« Au début des années 1960, Alain Darbel et Dominique Schnapper dénombraient, dans les administrations centrales, 11 % de femmes parmi les agents de catégorie A, 50 % parmi les B et 70 % parmi les C. »
Ces chiffres sont évidemment à mettre en parallèle avec les données récentes en administration centrale, y compris dans des directions pourtant relativement moins féminisées comme celles des ministères économiques et financiers.
L’évolution des normes permettant de lever les barrières à l’entrée des femmes dans la fonction publique
Cette féminisation de la fonction publique s’accompagne d’évolutions successives du droit3 :
Inscription du principe de non-discrimination dans le statut général des fonctionnaires en 1959 ;
Limitation des corps de fonctionnaires autorisés à recruter distinctement des hommes et des femmes en 1975,
Enfin, la suppression progressive des exceptions à cette règle, en particulier par la loi du 7 mai 1982.
« Dans la fonction publique d’État, les femmes sont majoritaires dans toutes les catégories d’emploi au tournant du siècle. En 2008, elles représentent 58 % des agents civils de l’État, 53 % hors enseignement. Elles sont alors également majoritaires parmi les personnels non titulaires, soit 60 % en 2008, hors enseignants. Elles sont les plus nombreuses dans les ministères sociaux (éducation, santé, travail – entre 65 % et 71 %) et moins nombreuses à l’Intérieur ou à l’Équipement (respectivement 32 % et 28 %), la nature des filières et des métiers étant évidemment diverse. »
L’exemple frappant est la féminisation de l’Éducation nationale
La croissance des effectifs désormais portée par les contractuels
Une évolution du nombre de contractuels particulièrement remarquable sur la période récente
De 1996 à 2021, les effectifs de la fonction publique ont augmenté de 23,4 % :
La croissance est d’abord portée, jusqu’en 2007, par l’augmentation du nombre de fonctionnaires ;
Puis, à partir de 2007, par les contractuels. Le nombre de fonctionnaires et militaires étant même en diminution de 2,3 % sur la période (1,6 % si l’on retient uniquement les fonctionnaires civils).
La part de contractuels parmi l’ensemble des effectifs connaît ainsi une augmentation régulière :
Après une relative stabilité du milieu des années 1990 jusqu’aux années 2000 autour de 14,5 %,
La part de contractuels augmente au début des années 2000 jusqu’à atteindre 17 % en 2010.
Toutefois, ce niveau élevé de contractuels n’est pas inédit et est équivalent à ceux relevés dans les 1970.
Une reconnaissance juridique d’un état de fait : l’augmentation du nombre de contractuels
La situation des contractuels a longtemps été un « angle mort juridique », n’étant pas couvert par le Code du travail et très peu par le droit de la fonction publique4. Leur protection sociale est faible et les contrats peuvent être renouvelés sans limites, contrairement aux salariés de droit privé.
C’est le droit communautaire qui, transposé dans la loi du 26 juillet 2005, fixe à six la durée maximale des contrats à durée déterminée, impliquant l’apparition d’une bizarrerie conceptuelle et juridique dans le paysage statutaire : le contractuel en contrat à durée indéterminée.
La fonction publique de l’État présente une trajectoire heurtée avec, comme énoncé plus haut, une augmentation relativement constante du nombre de contractuels et, à rebours, une baisse, plus ou moins rapide, du nombre de fonctionnaires.
Ces évolutions sont particulièrement marquantes dans l’Éducation nationale :
Un objectif politique de réduction du nombre de fonctionnaires et de promotion du management inspiré du secteur privé
Outre ce changement législatif, il convient de relever une terminologie politique mouvante avec une succession depuis les années 2000 des politiques de « modernisation » et l’assignation d’objectifs « managériaux » aux agents publics. À cet égard, la Revue générale des politiques publiques (RGPP) de 2007 marque un tournant :
La réduction du nombre de fonctionnaires devient un objectif gouvernemental et
Le ministère de la Fonction publique, généralement placé auprès du Premier ministre, est désormais rattaché au ministère du Budget.
Les résultats de cette politique de réduction du nombre de fonctionnaires pour l’État, la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière
De 2002 à 2012, les effectifs de fonctionnaires de l’État sont en baisse, puis, de 2012 à 2022, on observe un équilibre entre recrutements et départs.
Dans la fonction publique territoriale, se dessine, au contraire, une forte hausse des effectifs, puis un ralentissement. L’augmentation du nombre d’agents publics est dorénavant exclusivement imputable aux recrutements de contractuels.
En dépit du ralentissement de cette croissance, sur une période relativement longue et en comparaison avec les autres pays de l’OCDE, la France présente une dynamique d’évolution du nombre d’agents publics territoriaux supérieure à la moyenne :
Les filières de la fonction publique territoriale qui ont connu une croissance la plus forte de 2010 à 20175 sont celles :
De l’animation, notamment dans le périscolaire et l’extrascolaire (+ 59 % d’effectifs) ;
De la police municipale (+ 16 %) ;
Du médicosocial, dont les auxiliaires de puériculture pour l’accueil de jeunes enfants (+ 16 %) ;
Du médico-technique, ce qui comprend les vétérinaires, biologistes ou techniciens paramédicaux (+14 %).
Enfin, dans le secteur hospitalier, l’augmentation des effectifs est continue, avec une évolution substantielle au début des années 2000 : l’essor du nombre de contractuels :
80 % de la croissance des effectifs de 2005 à 2021 est portée par les recrutements de contractuels ;
La part des contractuels dans l’emploi total passe ainsi de 8 % en 1996 à 11 % en 2000, 16 % en 2010 et près de 22 % en 2022.
Toutefois, leur part relative baisse depuis une dizaine d’années (INSEE). ↩
Le constat de France stratégie est à nuancer cependant, la France présentant, sur la quasi-intégralité des typologies de dépenses (exception faite des dépenses de sécurité intérieure), un niveau de dépenses supérieur à la moyenne de l’OCDE. ↩
Dans ce chapitre introductif, les chercheurs tendent à démontrer que la question de l’attractivité s’impose désormais dans le débat public. Pour autant, ce problème n’est pas nouveau, ses ressorts sont complexes et nécessitent une remise en cause probablement profonde des administrations et de leurs chefs de service.
Une dénonciation ancienne du « trop grand nombre de fonctionnaires »
Les rapporteurs précisent d’abord que le néologisme « bureaucratie » a été créé par l’économiste physiocrate Vincent de Gournay (1712-1758). L’objet de ce concept était déjà de dénoncer l’influence, jugée trop importante, des fonctionnaires sur la vie sociale et économique du pays. En spécifiant qu’alors, l’administration de l’État monarchique était très (très) modeste.
Ces premiers éléments rappellent à l’évidence les travaux d’Émilien Ruiz, notamment rassemblés dans son ouvrage Trop de fonctionnaires dont est tiré le graphique suivant :
Le souci de bien recruter et bien former
La sélection par concours et la création d’écoles spécialisées dès le début du XIXe siècle
La compétence et la formation des agents deviennent progressivement un critère de recrutement avec l’affermissement de l’État.
Les ministères chargés de l’Équipement et des Armées sont les premiers à développer une logique de concours, puis de formation préalable au recrutement :
L’École des ponts et chaussées est fondée en 1747 ;
L’École spéciale militaire de Saint-Cyr en 1803 et
L’école Navale en 1830.
La logique de sélection et de formation des agents publics compétents est ensuite graduellement adoptée dans les administrations civiles. Dès 1835, un concours est ainsi mis en place pour l’accès à la magistrature2.
Un long chemin vers la généralisation du concours
Une montée en puissance progressive du milieu du XVIIIe jusqu’à la fin de la IIIe République
Dès 1844, un rapport propose de sélectionner au mérite, par concours, examen ou diplôme les agents publics.
Cette effervescence intellectuelle et libérale permettra la création quatre ans plus tard, en 1848, de la première École nationale d’administration pour sélectionner les agents administratifs de l’État.
Toutefois, cette école survivra à peine quelques mois et il faudra attendre la Troisième République pour voir le système de concours émerger de nouveau.
Une consécration juridique à compter de la moitié du XXe siècle
Le souci de sélection et de formation se renforce sous Vichy dans une approche punitive et culpabilisante. Les fonctionnaires étant tenus pour partie responsable de la débâcle.
Le concours devient alors un fondement du recrutement des fonctionnaires3 :
L’article 27 de la « loi » du 14 septembre 1941 dispose ainsi que :
« Nul ne peut être admis à un emploi de début s’il n’a satisfait aux épreuves d’un concours ou aux examens de sortie d’une école lorsque le recrutement est assuré par cette voie. »
Pour autant, ici comme ailleurs, les « valeurs » portés par Vichy se révèlent à l’usage très peu suivi d’effets.
Le régime a besoins de bras pour réaliser ses « missions » et, pour ce faire, non seulement il recrute des agents publics, mais il le fait davantage encore que sous la IIIe République, en dehors des modes de recrutements traditionnels :
En 936, l fonction publique comptait 106 000 agents non titulaires (19,7 % de l’emploi public) ;
En 1946, ils étaient 356 000 (40 %).
Le principe de sélection par concours sera réaffirmé dans le statut de 1946 (premier statut républicain de la fonction publique), puis par le statut général de 1983. Toutefois, il ne présente pas de caractère constitutionnel4.
Un problème d’attractivité ancré dans l’histoire de la fonction publique
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, des difficultés recrutements pour la quasi-totalité des ministères
De 1952 à 1964, la population française augmente de près de cinq millions et demi de personnes. Nous sommes alors en plein « baby boom ». Assez logiquement, d’importantes administrations voient leurs effectifs augmenter fortement :
Le ministère de l’Éducation nationale double ainsi ses effectifs, dans un contexte d’augmentation du nombre de jeunes suite aux naissances d’après-guerre et de l’essor d’une scolarisation de masse de ces derniers ;
Le ministère des Postes et des télécommunications recrute près de 57 000 postiers.
Cependant, le nombre total d’agents publics dans les autres ministères (Armées, Intérieur, Santé et Travaux publics notamment) connaît une croissance particulièrement faible, de l’ordre de 1 000 recrutements par an. Cette très faible croissance s’explique par les difficultés de recrutement de l’administration.
Ces difficultés de recrutements sont dues au trop faible nombre de candidats
Le nombre de candidats aux concours de la fonction publique de catégorie A (cadre) et B (cadre intermédiaire) est particulièrement bas sur la période.
Jean-Luc Bodiguel et Luc Rouban recensent ainsi :
« 162 candidats inspecteurs élèves des impôts pour 360 postes en 1960, 16 candidats inspecteurs de la Sécurité sociale pour 32 postes en 1958. »
Il en va de même pour les écoles de service public comme l’ENA (1945) et l’ENM (1958) :
« En 1964, la Magistrature était bien heureuse d’avoir deux candidats pour un poste [5 pour 1 en 1953] .(…) Situation identique à l’ENA où, entre 1957 et 1960, on ne put, au concours étudiant, pourvoir qu’à 155 postes pour 162 offerts, malgré la faiblesse du taux de sélection : 1 reçu pour 3,5 candidats. »
La situation actuelle en terme d’attractivité
Une tension généralisée dans les recrutements (secteur privé et public)
Il convient de relever tout d’abord l’augmentation du taux d’emploi et la baisse du chômage.
Huit métiers sur dix (représentant 87 % de l’emploi) sont en tension forte ou très forte selon la DARES5.
Mécaniquement, la concurrence est donc plus forte entre les entreprises, associations et administrations dans le recrutement de salariés qualifiés. Plus encore, lorsque les métiers ou compétences sont comparables
Un phénomène qui demeure toujours difficile à qualifier
Les rapporteurs soulignent ainsi qu’avant 2009, il n’existe aucune base de données fiable sur le nombre d’agents des services publics.
Par ailleurs, le sujet souffre également d’une difficulté dans le choix des indicateurs :
Les emplois vacants ?
La durée de vacance desdits emplois ?
Le nombre de candidats au concours ?
Le turn-over dans les structures ?
Enfin, les comparaisons internationales sont encore plus complexes. La Commission européenne6 éprouve également des difficultés :
« Les offices statistiques nationaux et les institutions internationales n’utilisent pas les mêmes définitions et méthodologies, ce qui entraîne des incohérences entre les pays et confirme la nécessité d’améliorer la validité et la cohérence des données dans ce domaine. »
Les écoles d’ingénieurs créées sous la monarchie (dont celles des ponts et chaussées) sont conservées, en étant intégrées au parcours des polytechniciens. ↩
Toutefois, la création d’une école, l’École nationale de la magistrature, n’est réalisée qu’en 1958. En précisant également que les magistrats financiers de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes, ainsi que les magistrats administratifs ne disposent pas d’école de formation dédiées. ↩
Le premier statut de la fonction publique est créé par le régime de Vichy, toutefois, l’idée statutaire traverse toute la IIIe République. ↩
C’est le principe d’égal accès en fonction des « capacités » du citoyen qui revêt un caractère constitutionnel, conformément à l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 (voir notamment la décision du juge constitutionnel du 28 janvier 2011, n° 2010-94). ↩
France stratégie a publié fin décembre 2024 un rapport très commenté sur la situation de la fonction publique.
Le constat dressé est alarmant, voire décourageant. On y découvre une fonction publique en crise profonde, marquée par un déclin profond de son attractivité :
Les difficultés de recrutement sont majeures : 15 % des postes non pourvus en 2022 ;
Ces difficultés résultent d’une dévalorisation des métiers et de conditions de travail jugées dégradées ;
Les rémunérations et promotions se révèlent en moyenne moins intéressantes que dans le privé ;
Plus inquiétant : on assiste également à un recul des inscriptions dans les filières universitaires, principal vivier de la fonction publique ;
Enfin, toutes ces difficultés de recrutement et de fidélisation du personnel entrainent une dégradation des services publics : accueil des jeunes enfants, éducation, santé, justice.
Le rapport traite des trois fonctions publiques. Cependant, je m’attarderai principalement sur la situation de l’État.
Une crise de la FP profonde et multidimensionnelle
La crise d’attractivité traversée par la fonction publique française est multidimensionnelle et s’installe dans la durée. Elle concerne, dans des proportions variables, les trois versants de la fonction publique :
La fonction publique d’État ;
La fonction publique hospitalière ;
La fonction publique territoriale.
Cette fragilisation s’observe désormais à tous les moments de la relation de travail :
Avant l’embauche, avec un tarissement des viviers de recrutements et un moindre intérêt des jeunes vers les métiers du service public1 ;
Pendant le processus de recrutement, avec des proportions de renoncements de lauréats de concours plus élevées qu’auparavant ;
Puis, au cours de carrière, avec une augmentation des départs volontaires, en particulier dans l’Education nationale.
« Le phénomène est d’autant plus préoccupant que la pénurie engendre la pénurie.
[…]
« Une spirale négative se met en place, reliant les difficultés de recrutement, la dégradation des conditions de travail, la moindre qualité du service et le manque d’attractivité. »
Une situation qui se dégrade
Une crise qui concerne l’ensemble des principaux métiers proposés par l’État
Dans la fonction publique d’État (FPE), les problèmes de recrutement affectent tout particulièrement les métiers des ministères qui recrutent le plus :
Ministère de l’Éducation nationale (enseignants),
Ministère de l’Intérieur (gardiens de la paix, gendarmes),
Ministère de l’Économie et des Finances (inspection des finances publiques),
Ministère de la Justice (surveillants pénitentiaires et, dans une moindre mesure, greffiers),
Ministère des Armées (militaires du rang et sous-officiers2).
Les métiers très qualifiés des autres ministères (notamment les spécialistes du numérique).
« En 2022, ce sont 15 % des postes offerts aux concours de la fonction publique d’État qui n’ont pas été pourvus (contre 5 % en 2018)4. Un véritable décrochage s’observe depuis les années 2010. »
« Les postulants deviennent insuffisamment nombreux pour couvrir les besoins et les taux de sélectivité plongent : en moyenne, douze candidats se présentaient pour un poste aux concours externes de la FPE sur la période 2000-2010, ils ne sont plus que quatre en 2022. »
L’Education nationale est le ministère le plus exposé à la pénurie, mais les difficultés de recrutement sont généralisées
Les concours de recrutement d’enseignants connaissent, en effet, une désaffection importante. Toutefois, la baisse du nombre de candidats se constate pour l’ensemble des recrutements.
En conséquence, pour l’Éducation nationale, le nombre de postes vacants mesurés à la rentrée scolaire connaît une hausse quasi constante :
De 1 988 postes vacants en 2006,
À 4 774 en 2023.
Le recours accru aux contractuels ne permet pas de compenser le manque de candidats aux concours.
Une nouvelle problématique : les départs volontaires
« On observe parallèlement une fragilisation croissante de la capacité de la fonction publique à retenir ses agents. »
En rappelant qu’en droit de la fonction publique, la démission unilatérale n’existe pas. Le fonctionnaire étant recruté par arrêté ministériel ou interministériel, l’administration doit accepter le départ de l’agent5.
Il s’agit donc d’un fait relativement nouveau par son ampleur et sa nature : marquant une forme de délitement du lien entre certains agents et leur administration.
Le tarissement des voies traditionnelles de recrutement
Le manque de candidats aux concours résulte, pour les cadres, d’un tarissement des effectifs d’étudiants dans les filières générales de l’université.
Le nombre d’inscrits en université devrait stagner jusqu’en 2031, selon les projections du ministère de l’Enseignement supérieur6.
À l’inverse, l’enseignement supérieur privé, moins susceptible de conduire à une carrière dans la fonction publique, continue de croître.
Une difficulté plus grande encore pour les formations dédiées à la préparation des concours de la fonction publique
Les étudiants se détournent en particulier des sciences de l’éducation, qui connaissent une chute marquée des inscriptions, autant en licence qu’en master :
De 2016 à 2023, les effectifs en master des métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation ont baissé de 26 %.
Toutefois, le recul est également marqué pour les effectifs inscrits en Institut de préparation à l’administration générale (IPAG) :
De 2008 à 2020, le nombre d’étudiants inscrits en IPAG a baissé de 35 %.
Une jeunesse peu intéressée par l’emploi public
En creux, ce qui apparaît à la lecture du rapport est une forme de désintérêt diffus et profond (puisque partagé) pour la sphère publique :
« La part des sortants de formation initiale qui choisissent l’emploi public décroît, tous diplômes confondus. »
« La « troisième explosion scolaire », traduite par la croissance des effectifs des jeunes débutants diplômés du supérieur, y compris dans les disciplines les plus pourvoyeuses d’agents publics, comme les sciences humaines et sociales, semble ainsi s’être réalisée au seul profit du secteur privé. Le nombre de débutants diplômés du supérieur a, en effet, crû de 17 % dans le secteur privé, mais chuté de 29 % dans le secteur public de 2007 à 20197. »
Les raisons de cette désaffection
Une dévalorisation des métiers
La majorité des agents publics rejoignent la fonction publique pour exercer un métier précis : policier, juge, greffier, enseignant, militaire, inspecteur (des finances publiques, du travail…). Or, ces métiers sont de plus en plus dévalorisés.
Les principaux éléments cités sont :
Le manque de reconnaissance, alimenté par les discours politiques et médiatiques négatifs et par les exigences des citoyens ;
La détérioration des conditions d’exercice ;
Enfin, la représentation de ces métiers comme une « vocation », avec un sous-entendu sacrificiel suscitant : « davantage de compassion que d’envie ».
Une interrogation profonde sur le modèle d’emploi
Par ailleurs, la concurrence à l’œuvre dans la « quête de sens » des actifs est majeure. L’État n’y occupe plus la première place8.
Ce déclin de l’État s’inscrit dans une contestation de sa neutralité (et, peut-être plus encore, des exécutifs locaux), au profit d’organisations non gouvernementales, d’associations, voire d’entreprises à mission.
Le rapport relève également les difficultés inhérentes au recrutement par concours, en particulier par l’incertitude tenant au lieu de première affectation.
Dans ce cadre, le seul argument d’une garantie de l’emploi, qui plus est dans un contexte de baisse du chômage et d’une tension sur les recrutements dans le privé, ne permet pas d’attirer de jeunes actifs.
Le développement ambivalent du recrutement contractuel
Les contractuels bénéficient d’avantages qui semblent attrayants :
Des modalités d’accès simplifiées (ce point a notamment été relevé dans un rapport récent de la Cour des comptes s’agissant de la direction du budget),
Un recrutement local qui lève les contraintes de l’affectation géographique,
Des niveaux de rémunération plus élevés que les titulaires dans certains cas.
Toutefois, la très grande majorité des jeunes entrés dans la FPE comme contractuels (CDD) n’y restent pas9. Par ailleurs, la part des titularisations tend à baisser.
Le recours accru aux contrats peut aussi conduire à fragiliser l’attractivité du statut lui-même.
Un double cadre de gestion s’installe durablement : celui des titulaires et celui des contractuels. Ces deux cadres évoluent en parallèle, potentiellement pourvoyeur d’inégalités, voire de rivalités.
Le modèle de gestion de la FP
Un instrument de promotion social pour les plus diplômés issus de milieux modestes
La fonction publique reste un débouché privilégié pour les diplômés des catégories modestes, et plus encore pour les femmes10.
Pour ces deux catégories, la « pénalité » pour l’accès aux postes d’encadrement est moindre dans le secteur public que dans le privé. Cette surreprésentation des enfants de catégories populaires parmi les cadres du public a eu en outre tendance à s’accentuer dans la période récente :
Pour autant, une difficulté à promouvoir en interne les moins diplômés
En dépit d’un recrutement socialement plus égalitaire (à niveau de diplôme égal), la fonction publique peine ensuite à promouvoir ses agents.
La logique de catégories, contestée encore récemment par le ministre chargé de la fonction publique11, semble réduire pour partie les perspectives d’évolution professionnelle des agents les moins diplômés. Le passage d’une catégorie à l’autre suppose la réussite à des concours ou des examens professionnels, qui peuvent pénaliser les publics les moins qualifiés12.
« Pour ceux qui commencent en bas de l’échelle, les perspectives d’évolution socioprofessionnelles se traduisant par un changement de catégorie et un accès aux échelons supérieurs de la hiérarchie sociale sont en définitive plus limitées que dans le privé. »
Des rémunérations devenues problématiques, en particulier pour les plus diplômés
L’évolution de la rémunération moyenne des agents publics a été inférieure à celle du privé tous les ans de 2011 à 2020 :
En s’attachant à une cohorte de jeunes actifs, on constate des évolutions du salaire médian particulièrement différenciées, alors même que la fonction publique est structurellement plus diplômée que le secteur public :
« De 2002 à 2019, le salaire médian des jeunes travaillant dans le secteur public a progressé en termes réels de 52 %, celui des jeunes du privé de 65 %. »
La fonction publique maintient globalement un positionnement salarial plus favorable au fil de la carrière que le privé pour les moins diplômés.
En revanche, pour les plus diplômés, les perspectives de progression salariale sont moindres dans la fonction publique :
Pour les hommes diplômés, le secteur privé propose des perspectives salariales nettement plus profitables13 ;
Pour les femmes, il existe un avantage salarial dans la fonction publique en début et milieu de carrière. Toutefois, cet intérêt s’estompe ensuite, en faveur du secteur privé.
Le rapport note également que la complexité du mode de rémunération dans le secteur public participe de la baisse d’attractivité.
Un déclin de l’autonomie et de la qualité de vie au travail
L’un des derniers avantages comparatifs encore en faveur des agents publics concerne l’autonomie au travail. Cependant, cette spécificité tend à se réduire, notamment pour les emplois plus qualifiés et pour les enseignants, alors même que le soutien hiérarchique reste faible comparé au privé.
Le rôle des collectifs de travail constitue également un atout du public :
Les salariés du public se déclarent très souvent aidés par leurs collègues (87 %), davantage que dans le privé (79 %), et ce chiffre est en augmentation de 2013 à 2019.
C’est particulièrement vrai dans les métiers peu qualifiés (agents d’entretien, cuisiniers, jardiniers) ainsi que dans le secteur hospitalier, où les collectifs de travail jouent un rôle essentiel : 92 % des salariés s’y sentent soutenus par leurs collègues, contre 82 % de l’ensemble des salariés. Mais, ici encore, ces avantages sont susceptibles de se déliter sous l’effet de la multiplication des statuts et de l’intensification du travail.
Enfin, le temps de travail est plus faible que dans le privé, mais en contrepartie d’un travail sur des horaires plus fréquemment atypiques (soir et weekend). Cependant, une nouvelle fois, les différences entre le secteur public et le privé semblent se réduire.
Ce rapprochement des conditions de travail interroge. Régulièrement soulevé par la doctrine juridique, depuis l’apparition du statut jusqu’à la loi de transformation de la fonction publique, il ne cesse de soulever les débats. Ce clivage constitue d’ailleurs, pour Maya Bacache-Beauvallet, un sujet politique structurant du partage gauche-droite14.
On pourrait préciser que le moindre intérêt pour le service public concerne… le service public « du secteur public ». Le rapport met ainsi en avant une forme de concurrence dans la réponse au besoin de sens des actifs avec les secteurs associatifs et entrepreneuriaux. L’Etat n’a plus (s’il l’a déjà eu) : « le monopole de l’intérêt général ». ↩
Toutefois, les métiers techniques qui mobilisent des compétences spécifiques transposables dans le civil sont particulièrement difficiles à recruter. C’est le cas des informaticiens en cybersécurité et renseignement ou des ingénieurs dans le domaine de l’armement. ↩
Voir également le rapport de la Cour des comptes (2024), Le budget de l’État en 2023. Résultats et gestion, cité par France stratégie. ↩
DGAFP (2024), Rapport annuel sur l’état de la fonction publique – édition 2024.↩
Par ailleurs, une démission n’ouvre pas droit au chômage (en code du travail comme au code général de la fonction publique). ↩
SIES (2023), « Projection des effectifs dans l’enseignement supérieur pour les rentrées de 2022 à 2031 », Note d’information du SIES, n° 2023-04, avril (cité dans le rapport de France stratégie). ↩
Ce constat, inquiétant, fait écho au billet de Luc Rouban sur le risque de paupérisation de la fonction publique. ↩
Ce qui peut apparaître très étrange pour nombre d’agents publics, convaincus du caractère essentiel de leurs missions. ↩
Il faut toutefois préciser que les métiers de cadres dans la fonction publique d’État (mais également dans les autres fonctions publiques) nécessitent des compétences juridiques. Cela peut-être moins le cas dans les services, où les compétences requises pour l’accès à des fonctions supérieures peuvent être plus larges : commerciales, comptables, managériales… ↩
Le secteur privé est moins égalitaire que la fonction publique s’agissant de l’égalité femmes-hommes. ↩
Économie politique de l’emploi public, Édition Connaissances et Savoirs, Paris, 2006, 362 p. ↩
Un bilan de gestion du corps interministériel des attachés d’administration de l’État a été présenté au Conseil supérieur de la fonction publique de l’État le 13 juillet 2016. Il est disponible sur le site internet d’Acteurs publics1.
Le décret n° 2011-1317 du 17 octobre 2011 portant statut particulier du corps interministériel des attachés d’administration de l’État est l’acte fondateur de ce nouveau corps.
Voilà les principaux éléments du bilan ici synthétisés.
Des vagues d’intégration de 2013 à 2019
L’intégration en 2013 de treize corps ministériels
L’article 20 du décret n° 2013-876 du 30 septembre 2013 a eu pour objet principal de procéder à l’intégration, dans le corps interministériel des attachés d’administration de l’État, des membres des treize corps ministériels suivants :
les attachés d’administration des services du Premier ministre,
les attachés des Affaires sociales,
les attachés de l’Agriculture et de la pêche,
les attachés de la Culture et de la communication,
les attachés de l’Économie, des Finances et de l’Industrie,
les attachés de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur,
les attachés de l’Équipement (écologie),
les attachés de l’Intérieur et de l’Outre-mer,
les attachés des juridictions financières,
les attachés de la Justice,
les attachés du Conseil d’État et de la Cour nationale du droit d’asile,
les attachés de la Caisse des dépôts et consignations,
les attachés de l’Office national des forêts.
Le texte a également fixé les modalités d’adhésion des membres des trois corps en extinction suivants :
les conseillers d’administration scolaire et universitaire (CASU),
les directeurs de préfecture et
les chefs des services administratifs du Conseil d’État.
L’intégration en 2014 des personnels civils administratifs relevant du ministère des Armées
Le mouvement s’est poursuivi par l’article 8 du décret n° 2014-1553 du 19 décembre 2014 portant diverses dispositions relatives au corps interministériel des attachés d’administration de l’État, avec l’intégration des membres de deux corps suivants :
les attachés d’administration de la Défense (désormais, les Armées) et
les directeurs des services déconcentrés de la Défense.
L’intégration en 2015 des personnels civils administratifs relevant de l’aviation civile
les attachés d’administration de l’Aviation civile.
L’intégration en 2016 des personnels civils administratifs de l’OFPRA.
Enfin, le décret n° 2016-907 du 1ᵉʳ juillet 2016 portant diverses dispositions relatives au corps interministériel des attachés d’administration de l’État fixe les modalités d’adhésion au corps :
des officiers de protection des réfugiés et apatrides de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA).
L’intégration, enfin, des secrétaires des affaires étrangères du cadre d’administration
Cette intégration, postérieure au bilan ici présenté, est intervenue par l’article 51 du décret n° 2019-86 du 8 février 2019 relatif aux instituts régionaux d’administration.
Un corps interministériel à gestion ministérielle
Le corps des attachés d’administration de l’État relève du Premier ministre. Toutefois, sa gestion est ministérielle. D’où l’expression « CIGEM » : pour corps interministériel à gestion ministérielle.
À titre de comparaison :
Les administrateurs de l’État (catégorie A, dite A+) appartiennent à un corps interministériel à gestion interministérielle2 ;
Les secrétaires administratifs à un corps ministériel (mais commun à l’ensemble des ministères), à gestion ministérielle3.
La répartition des attachés d’administration par grade
Compte tenu des rattachements évoqués plus haut, le corps des attachés relève aujourd’hui de seize autorités de rattachement, soit près de 31 500 agents à la date du bilan (2016), répartis dans les trois grades suivants :
18 500 attachés d’administration (11 500 femmes et 7 000 hommes) — environ 60 % du corps ;
11 000 attachés principaux (6 000 femmes et 5 000 hommes) — soit près de 35 % du corps ;
Enfin, près de 2 000 attachés hors classe (dont 500 directeurs de services), à parité entre femmes et hommes — soit 5 % du corps.
Au titre de 2015, l’âge moyen des agents promus attaché principal (examen professionnel et liste d’aptitude) est de 48,1 ans. Âge relativement stable comparativement aux exercices 2013 et 2014, avec respectivement 46,8 et 48,5 ans.
L’âge moyen des agents promus au grade d’attaché hors classe est lui de 50 ans au titre de 2015. L’échelon spécial est quant à lui accordé en moyenne à 59 ans.
La répartition des attachés d’administration par ministère
Deux ministères concentrent plus de la moitié des effectifs
Le principal recruteur est sans surprise l’Education nationale avec près de 12 000 attachés d’administration, pour un plafond d’emploi (projet de loi de finances pour 2015) de 984 000 équivalents temps pleins (ETP).
Le second grand vivier d’attachés d’administration est constitué par le ministère de l’Intérieur4 avec près de 5 500 attachés d’administration, pour 284 000 ETP.
Les 45 % restants se répartissent dans les différents ministères, juridictions et à la Caisse des dépôts et consignations
Répartition des attachés d’administration dans les autres ministères5 :
2 800 au ministère de l’Ecologie (ex-équipement)6, pour près de 44 400 ETP ;
2 300 au sein des ministères sociaux (travail et santé), pour 20 000 ETP7 ;
1 400 au ministère de l’Agriculture, pour 31 000 ETP ;
1 000 au ministère de la Justice, pour 79 000 ETP ;
800 à la Caisse des dépôts et consignations ;
600 au ministère de la Culture, pour 11 000 ETP ;
500 dans les services du Premier ministre (dont les effectifs des secrétariats généraux affaires régionales) pour près de 10 000 ETP ;
400 dans les juridictions financières (dont les vérificateurs placés auprès des magistrats) ;
160 au Conseil d’État ;
150 à l’Office national des forêts.
Ce qui saute aux yeux est évidemment la petitesse de leur nombre, au regard de l’ensemble des effectifs desdits ministères.
Les avantages d’un corps interministériel
La création d’un corps interministériel visait à faciliter la mobilité et l’attractivité du corps des attachés d’administration.
En termes opérationnels, la création de ce corps a permis les avancées suivantes :
La fin de la pratique du détachement et de la double carrière. Les attachés d’administration peuvent désormais librement passer d’une administration à une autre8 ;
L’application d’un taux de promotion pour l’accès au grade d’attaché principal identique pour toutes les autorités de gestion du corps depuis 2015. Ce taux de référence est de 7 % ;
Une convergence indemnitaire entre les autorités de gestion (encore imparfaite) ;
La création d’un troisième grade d’attaché hors classe et d’un échelon spécial dans le corps interministériel des attachés d’administration de l’État. L’objectif étant de revaloriser la carrière du corps des attachés, de mener une réflexion sur la cartographie des fonctions de catégorie A et d’ouvrir de nouvelles perspectives fonctionnelles pour les attachés principaux les plus confirmés.
La composition du corps
Des entrées dans le corps très hétérogènes
Au titre de 2015, près de 2 000 recrutements ont été réalisés :
600 par la voie des Instituts régionaux d’administration (IRA) ;
100 par la voie de concours directs organisés par les ministères ;
300 par la voie du concours réservé dit « Sauvadet » (pour les contractuels) ;
500 par liste d’aptitude au titre de la promotion interne ;
160 par examen professionnel ;
285 par intégration directe ou détachement.
Les recrutements réalisés par les IRA sont donc particulièrement faibles, constituant à peine le tiers des entrées.
Des sorties moins élevées, signe d’un corps en expansion
En effet, seules 1 200 sorties sont relevées sur l’exercice 2015. Parmi celles-ci, près de 1 000 départs en retraite.
Le reliquat est constitué de promotions de corps (administrateurs civils, magistrats…), une intégration dans un autre corps (inspecteur des finances publiques…) ou par une sortie de la fonction publique.
Un corps faisant l’objet d’une mobilité ministérielle et interministérielle
Près de 2 000 mobilités annuelles au sein de l’autorité de gestion sont enregistrées chaque année (changement de service ou d’établissement), pour environ 500 mobilités en dehors de l’autorité de gestion (mobilité interministérielle). Soit un taux de mobilité d’environ 8 %.
A ma connaissance, les autres bilans de gestion n’ont pas été rendus publics, ce qui interroge sur la transparence dans la gestion des effectifs. Ces bilans sont prévus à l’article 7 du décret n° 2011-1317 du 17 octobre 2011. ↩
Article 4 du décret n° 2010-302 du 19 mars 2010 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux corps des secrétaires administratifs des administrations de l’Etat et à certains corps analogues relevant du décret n° 2009-1388 du 11 novembre 2009 portant dispositions statutaires communes à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique de l’Etat. ↩
Nous ne disposons pas du nombre d’attachés pour les affaires étrangères, près de 17 000 ETP au titre de 2006, mais les effectifs d’attachés y sont également très modestes. ↩
Le vieillissement des travailleurs n’est évidemment pas propre à la fonction publique2. En revanche, compte tenu de l’importance des trois fonctions publiques françaises au regard de l’ensemble des actifs, un rapport n’était pas inutile.
Un vieillissement principalement lié aux réformes successives des retraites
À cet égard, le graphique présenté par la Cour est éclairant :
Cette pression du vieillissement est due à deux phénomènes conjugués :
Un départ en retraite plus tardif,
Une arrivée dans la fonction publique, également plus tardive.
On peut également y ajouter une politique de recrutements heurtée, qui a induit notamment sous le mandat de Nicolas Sarkozy, un vieillissement de la cohorte du fait du non-remplacement de l’ensemble des fonctionnaires partant en retraite :
Des agents qui partent en retraite de plus en plus tard
La Cour note ainsi que les agents civils sédentaires partent en moyenne à 63 ans et 8 mois.
Le report de l’agent de retraite à 64 ans n’aura donc qu’un effet très marginal sur la fonction publique :
« La dernière étude communiquée par les services de l’État à la Cour évalue le « gain » de ce report (de l’âge de retraite à 64 ans) à 150 M€ pour 2024 et 2025. Pour une masse salariale estimée à 153,6 milliards d’euros sur 2024. »
« Les différentes réformes de 2003, 2010 et 2014 ont progressivement repoussé l’âge de départ à la retraite des agents de la fonction publique. En 2006, 80 % des agents de catégorie sédentaire3 de la FPE partaient avant 61 ans, ils n’étaient plus que 10 % en 2022. Les agents de catégorie active enregistrent la même évolution : la part des fonctionnaires civils de catégorie active partant à la retraite après 55 ans est passée de 39 % en 2006 à 93 % en 2022. »
Des jeunes de moins en moins jeunes
L’âge moyen d’entrée dans la fonction publique d’État est en constante augmentation depuis plusieurs décennies :
« Pour les agents civils, l’âge moyen d’entrée passe de 23 ans en 1980 à 29 ans en 2020. Cette tendance qui a vocation à se poursuivre s’explique par l’augmentation de la durée des études (qui vaut aussi pour la population générale) et les effets des « doubles carrières » privé/public, de plus en plus fréquentes. »
Les agents de l’État sont particulièrement concernés, puisqu’il s’agit de la fonction publique structurellement la plus diplômée.
De 1980 à 2020, l’âge moyen d’entrée dans la fonction publique passe ainsi :
De 26 à 31 ans pour la catégorie A,
De 22 à 26 ans pour la catégorie B et
De 23 à 27 ans pour la catégorie C.
Des différences marquées entre fonctions publiques
La moyenne d’âge des agents de la fonction publique d’État est de 44 ans. Ce qui correspond également à la moyenne d’âge de l’ensemble des agents des trois fonctions publiques.
Toutefois, en analysant plus précisément chaque fonction publique, des disparités se font jour :
La moyenne d’âge de la fonction publique territoriale est de 46 ans, c’est la plus élevée des trois fonctions publiques ;
À l’inverse, la moyenne d’âge de la fonction publique hospitalière est de 42 ans. Il s’agit de la fonction publique la plus jeune.
À titre de comparaison, la moyenne d’âge dans le secteur privé est de 41 ans. L’écart avec le secteur privé s’explique essentiellement par l’entrée plus tardive dans la fonction publique.
La situation spécifique des seniors et les diversités de situation entre les trois fonctions publiques
La proportion d’agents civils de plus de 50 ans est de 33 % pour l’État, contre une moyenne de 36 % pour l’ensemble des fonctions publiques. L’État se distingue donc par une fonction publique comportant relativement moins de « seniors ».
La spécificité de l’État tient aussi à la surreprésentation de catégories A et A+ parmi les agents de plus de 60 ans. Ces derniers connaissant par ailleurs une forte dynamique démographique :
« La situation des agents de plus de 60 ans différencie nettement la FPE du reste de la fonction publique : depuis 2010, leur part dans les effectifs est passée de 4 % à 9 % en 2021, elle devrait s’élever à l’échéance de 10 ans à 12 %, puis en 2040 à 14 %. »
À l’inverse, le vieillissement accéléré est plus marqué pour les agents de catégorie C dans les collectivités territoriales.
Le cas spécifique des agents administratifs de catégorie A (et A+) de l’État
Les agents administratifs de la fonction publique représentent près de 162 000 agents :
31 000 attachés d’administration de l’État ;
51 000 secrétaires administratifs et
80 000 adjoints administratifs.
Ces professions, vieillissantes, sont par ailleurs très féminisées (a fortiori pour les secrétaires administratifs et adjoints). L’âge moyen des secrétaires d’administration atteint déjà 50 ans.
Pour les attachés d’administration, le besoin de renouvellement à 10 ans serait estimé à environ 35 % des effectifs actuels, soit 11 000 agents.
La Cour des comptes ne le relève pas, mais il convient aussi de préciser la transformation profonde à l’œuvre dans les effectifs administratifs avec :
Une suppression progressive des adjoints administratifs et
Une réduction du nombre de secrétaires administratifs.
La numérisation croissante de l’activité administrative ;
Le besoin d’une expertise de plus en plus pointue et
Une modification des modalités de fonctionnement des administrations, avec une dynamique de projet, toujours plus marquée (cas de la Direction générale des entreprises, par exemple).
Une accélération récente du vieillissement des agents pour l’État
Le vieillissement accéléré des agents de l’Education nationale
Les enseignants de l’Education nationale constituent 80 % des agents de catégorie A de l’État.
Or, parmi les agents de l’Education nationale, les agents de plus de 60 ans passeraient de 6 % du total des effectifs aujourd’hui à 16 % en 2035. Soit un niveau légèrement au-dessus de leur proportion dans l’ensemble de la fonction publique d’État.
La situation du ministère de l’Intérieur
Le ministère de l’Intérieur emploie un peu plus de 300 000 agents, dans la très grande majorité des fonctionnaires :
Ils appartiennent à la fonction militaire pour 34 % (les gendarmes) et
À 45 % aux personnels actifs de la police.
Autrement dit : près de 80 % de ses agents relèvent de régimes dérogatoires de date de prise de la retraite. Malgré cela, une part significative des agents du ministère de l’Intérieur se concentre autour de la cinquantaine.
Ce vieillissement s’explique par une politique de recrutement non-linéaire :
Des recrutements importants de 1998 à 2003,
Suivis de baisses d’effectifs de 2007 à 2015,
Puis, d’une nouvelle reprise des recrutements.
Un élément suscite toutefois une profonde interrogation, mais il ne fait malheureusement pas l’objet d’investigations plus approfondies de la Cour : la situation du réseau préfectoral.
Ce vieillissement accéléré semble signaler une profonde transformation à venir du réseau :
Les agents des ministères économiques et financiers (la DGFiP)
En raison de l’importance de leurs effectifs et de leur réseau déconcentré, un examen des grands corps d’inspection de Bercy s’imposait pour la Cour.
En effet :
La direction générale des Finances publiques (DGFIP) réunit 95 000 agents, dont 1 500 A+ et
La direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI), près de 17 000 agents.
À elles seules, ces deux directions représentent 87 % des emplois des ministères et financiers (MEF). Elles ont déjà fait l’objet d’un traitement par la Cour récemment, s’agissant de la gestion de ses informaticiens.
Une situation dégradée s’agissant de la DGFiP :
51 % des agents de la DGFiP ont plus de 50 ans et leur moyenne d’âge est de 48 ans4. Plus inquiétant, : cet âge moyen continue d’augmenter au fil des ans.
Le vieillissement est encore plus marqué pour les cadres supérieurs de la DGFiP (qui incluent les inspecteurs principaux, inspecteurs divisionnaires et administrateurs des finances publiques adjoints). 74,5 % d’entre eux ont plus de 55 ans et ils partent à la retraite, en moyenne, à 64,7 ans.
Une situation plus nuancée s’agissant des douanes :
La moyenne d’âge est de 46 ans et 1 mois pour les douanes. Soit un niveau légèrement supérieur à celui de l’ensemble de l’État. Toutefois, une part importante des effectifs de la DGDDI sont en catégorie active, ce qui est normalement de nature à baisser la moyenne d’âge du corps. Comme pour l’Intérieur, la situation en termes de ressources humaines est donc à surveiller.
Une évolution problématique des politiques de recrutement des hauts fonctionnaires
La Cour souligne les contradictions dans la gestion de l’encadrement supérieur
Des nominations de plus en plus jeunes aux plus hautes fonctions de l’État :
La Délégation interministérielle à l’encadrement supérieur de l’État (DIESE) observe la tendance, davantage marquée, à nommer des agents toujours plus jeunes à des postes d’encadrement supérieur :
La tranche des 41-45 ans est la génération la plus représentée parmi les nominations effectuées sur des postes de cadres dirigeants en 2023 : directeurs d’administration centrale, délégués interministériels, secrétaires généraux des ministères, préfets, ambassadeurs, recteurs.
De même, et comme on l’a vu ici dans une autre étude de la Cour sur l’évolution des rémunérations des cadres dirigeants de Bercy : l’accélération des carrières est un point central de la réforme de l’encadrement supérieur. Cette accélération devant inciter les hauts fonctionnaires à occuper des postes d’emplois fonctionnels5.
Une réforme de la haute fonction publique qui interroge sur les conditions d’emploi des hauts fonctionnaires les plus âgés :
En retenant uniquement les 2 600 cadres dirigeants suivis par la DIESE précitée :
52 % des agents ont plus de 55 ans (et 10 % plus de 65 ans) ;
35 % ont entre 45 et 55 ans ;
13 % ont moins de 45 ans.
Au total, l’âge moyen de la population des cadres dirigeants en poste s’établit à 56 ans (hommes) et 54 ans (femmes), leur laissant une perspective de vie professionnelle d’au moins 12 ans.
Création du corps des administrateurs de l’État et disparition des corps préfectoral, diplomatique et de l’ensemble des corps d’inspection :
Inspection générale des finances ;
Inspection générale des affaires sociales ;
Inspection générale de l’administration ;
Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche…
Fonctionnalisation en conséquence de ces différents métiers6, induisant une concurrence entre les hauts fonctionnaires et les contractuels.
Ainsi, il n’y a plus de « droit au retour » du haut fonctionnaire dans son ancien corps (diplomatique, préfectoral, inspection générale…). Ce qui constitue un point d’attention pour la Cour :
Le risque de créer une masse d’agents sans affectation, indépendamment de la gestion frictionnelle traditionnelle des nominations, est non seulement plus grand, mais aussi plus visible.
Les propositions de la Cour pour accompagner ce vieillissement
La retraite progressive
La retraite progressive permet aux bénéficiaires de réduire progressivement leur activité à l’approche de la retraite sans perte substantielle de rémunération.
Au 1ᵉʳ janvier 2024, le nombre d’agents éligibles était estimé à 124 000. Les générations de 1958 à 1963 concentrent plus de 90 % des éligibles :
47 % d’entre eux relèvent du ministère de l’Éducation nationale,
13 % du ministère de l’Économie et des Finances.
Pour autant, la Cour s’interroge sur le dispositif actuel :
L’incitation à la prise de temps partiels supérieurs à 50 % du temps de travail semble disproportionnée et peu compatible avec les nécessités de service ;
Le coût de cette incitation n’est pas suffisamment évalué, notamment au regard des gains attendus ;
L’impact sur les plafonds d’emplois soulève également une question ;
Enfin, le message doit également être plus clair et transparent :
« Certes, la décision d’accorder une préretraite progressive est à la main de l’employeur, toutefois cette mesure risque d’être considérée comme un acquis social lié à l’aménagement des conditions de travail et non comme un instrument de régulation de l’emploi, une contrepartie de l’allongement des carrières à destination des agents qui ont du mal à l’approche de la retraite à effectuer un temps plein. »
Diversifier les emplois des administrateurs de l’État et s’interroger sur la sortie de la fonction publique
Une première proposition consistant à développer les fonctions d’ « experts de haut niveau »
Les emplois des administrateurs de l’État sont les suivants :
En début de carrière : chargés de mission auprès d’un sous-directeur ou d’un directeur, adjoint auprès d’un chef de bureau ;
Chef de bureau,
Détaché sur un emploi fonctionnel.
Sauf à occuper un emploi fonctionnel, les perspectives de carrière sont donc réduites.
Par conséquent, la Cour préconise d’augmenter le nombre d’ « experts de haut niveau ». Certes, ces emplois sont fonctionnels (de ce fait, contingentés), mais leur nombre est aujourd’hui très réduit : moins d’une centaine de postes pour l’ensemble de l’État. Une première piste consisterait donc à augmenter le nombre de ces emplois afin de faire fructifier l’expérience des hauts fonctionnaires sans affectation.
On peut toutefois s’interroger sur la pertinence de cette analyse qui revient à inverser la réflexion sur les besoins d’une organisation de travail7.
Les autres propositions
D’autres perspectives sont esquissées par la Cour :
La limitation des prolongations au-delà de la limite d’âge8 (actuellement 67 ans) ;
L’utilisation des ruptures conventionnelles de façon ciblée.
La faiblesse des propositions de la Cour tient, il me semble, aux difficultés inhérentes aux réformes récentes de la fonction publique.
En effet, comme j’ai pu l’énoncer plus haut, la tension entre la fonction publique d’emploi et de carrière induit inévitablement un décalage :
La fonction publique de carrière est assise sur le recrutement par concours d’un fonctionnaire, avec l’accès à des emplois fonctionnels en dernière partie de carrière9 et
La fonction publique d’emploi est assise sur le principe de mise en concurrence des emplois d’encadrement supérieurs (avec les contractuels), en contrepartie d’une absence de droit à carrière10.
Les agents « sédentaires » sont les agents qui ne sont pas « actifs ». Les agents « actifs » sont les agents qui exercent des fonctions présentant des risques particuliers ou des fatigues exceptionnelles : infirmiers, aides-soignants, douaniers, policiers, personnels pénitentiaires, contrôleurs aériens. ↩
Pour rappel, la moyenne d’âge est de 44 ans dans la FPE. ↩
Les emplois fonctionnels correspondent aux emplois les plus élevés des trois fonctions publiques. Pour l’Etat, il s’agit des préfets, recteurs, délégués interministériels, directeurs d’administration centrale et secrétaires généraux, chefs de service et sous-directeurs. ↩
Autrement dit, l’accès à une fonction se fait après le passage devant un comité de sélection. Le haut-fonctionnaire sélectionné est alors détaché sur l’emploi. Si c’est un contractuel qui est sélectionné, il signe un contrat sur une période déterminée. ↩
En clair : la Cour préconise de créer des emplois fonctionnels, donc particulièrement rémunérés, pour occuper des hauts fonctionnaires qui, sinon, seraient sans affectation. À l’évidence, ces créations d’emplois d’experts de haut niveau devront donc restées mesurées. ↩
De très nombreux hauts-fonctionnaires sollicitent une prolongation de la limite d’âge afin de pouvoir demeurer sur leurs fonctions. ↩
En tempérant d’emblée le principe s’agissant de la France du fait d’une politique de recrutement de hauts fonctionnaires dès la sortie de l’enseignement supérieur ou peu après. ↩
En tout cas, théoriquement. Dans la fonction publique étasunienne, les agents gouvernementaux disposent tout de même d’une sécurité de l’emploi et de grilles salariales. ↩
La Cour des comptes rappelle d’abord les principales missions de la direction du Budget :
Assurer la coordination interministérielle dans l’élaboration et l’exécution des projets de loi de finances (les fameux « PLF ») ;
Surveiller la soutenabilité de la programmation et de la gestion de chaque ministère par son réseau de CBCM et CBR1.
La structuration de la direction du budget
La direction du budget comptait 382 agents à fin 2021 :
245 agents en administration centrale et
137 agents dans son réseau de comptables et contrôleurs budgétaires.
Celle-ci est composée quasi exclusivement de catégorie A (47 %) et A+ (43 %)2. Ce point est toutefois de plus en plus commun entre les directions d’administration centrale. Il s’explique par la technicité croissante des sujets traités.
Particularités dans le champ administratif :
Un taux de féminisation bas (43,2 % pour l’administration centrale), encore davantage marqué pour les emplois de direction et d’encadrement (moins du tiers) ;
Comme évoqué plus haut, la quasi-parité s’agissant des catégories A entre les encadrants dits « supérieurs », ou : « A+ », et les autres catégories A, essentiellement des attachés d’administration de l’État.
À noter :
Sur la période récente, la direction du budget a légèrement évolué :
Par l’ajout d’une fonction de « sous-directeur adjoint ». L’objectif étant de doter les sous-directeurs d’un adjoint afin de renforcer la fonction managériale et d’accroître les perspectives de promotion interne.
Une chaîne hiérarchique courte et une surreprésentation de hauts fonctionnaires
La Cour des comptes parle étrangement d’un « faible taux d’encadrement ». Ce qui semble être une erreur, ou alors le raisonnement est étrange, puisque dans les conclusions de la Cour, il est justement relevé que :
« 1,06 agent de catégorie A est encadré par 1 agent A+ en administration centrale. »
Une chefferie de bureau très exposée
Concrètement, l’essentiel du travail technique est réalisé au niveau du bureau sectoriel : par le chef de bureau et ses quelques agents4.
Le chef de bureau, comme pour les autres administrations centrales, se distingue par une expérience de plusieurs années. Autrement dit, de plusieurs cycles budgétaires. Cette expérience lui permet de disposer des réflexes à même de « sentir » les arbitrages sensibles et de prioriser les dossiers dans la conduite quotidienne du travail administratif.
Les agents de la direction
Commentaire :
Malgré la parité des effectifs entre les catégories A et A+, la Cour des comptes présente des développements quasi exclusivement consacrés aux seconds. Cette appréciation partielle nuit à la compréhension globale de la direction.
Une direction attractive, souvent considérée comme un « booster » de carrière pour les jeunes agents
La Cour des comptes note plusieurs éléments pouvant porter atteinte à l’attractivité de la direction :
Des contraintes horaires et calendaires fortes ;
Des tâches complexes et répétitives, notamment dans l’harmonisation des tableaux budgétaires, suite aux arbitrages ;
Une moindre rémunération indemnitaire pour les administrateurs de l’État primo-affectés à la direction du budget : 29 400 euros de primes annuelles en 2021 contre une moyenne de 32 800 euros pour l’ensemble des administrateurs civils d’alors.
Pour autant, en dépit des contraintes, la direction « demeure attractive » selon la Cour, car elle offre ainsi une importante visibilité aux agents. Visibilité qui permet aux agents de prétendre à des évolutions professionnelles rapides.
Une direction particulièrement jeune
« L’âge moyen des agents de la direction en administration centrale (39,2 ans) est inférieur de 8,5 années à celui de l’ensemble des agents d’administration centrale des ministères économiques et financiers en 2021 (47,7 ans). L’âge moyen des cadres A+ de l’administration centrale (34,0 ans) en 2022 est particulièrement jeune, de plus de dix ans inférieur à la moyenne de celui des cadres A+ des ministères économiques et financiers (44,7 ans) : 25 % des cadres A+ ont moins de 30 ans et 52 % ont moins de 35 ans, alors que 78 % des cadres A (moyenne d’âge de 44 ans) et 90 % des cadres B et C ont plus de 35 ans. »
La Cour des comptes explique la jeunesse de cet encadrement supérieur par :
Les modalités de recrutement de la direction en sortie d’école (élément partagé pour partie par la direction de la Sécurité sociale, notamment) ;
Un moindre intérêt des agents expérimentés pour des fonctions exigeantes5 et sans responsabilités managériales importantes. Fonctions qui peuvent également présenter un caractère rébarbatif et théorique – éloigné des politiques publiques6.
D’où viennent les agents de la direction du budget ?
La moitié des cadres supérieurs sont des administrateurs de l’État formés à l’Institut national du service public (ex-ENA), un cinquième est issu de Polytechnique et plus du tiers est contractuels : recrutés en sortie de grandes écoles de commerce ou de Sciences Po Paris.
À titre marginal, la direction compte également quelques profils atypiques : fonctionnaires des assemblées, militaires, administrateurs territoriaux, commissaires.
S’agissant des cadres A, la direction recrute auprès :
Des instituts régionaux d’administration (IRA) formant les attachés d’administration de l’État ;
Des agents confirmés d’autres directions, et notamment de la direction générale des Finances publiques ou de la direction générale du Trésor, voire d’autres ministères, enfin
Des contractuels, ayant le plus souvent assuré des fonctions financières dans le privé.
Où partent-ils ?
La Cour des comptes n’a répertorié que les mobilités des A+.
En 2018, à l’issue de leur passage dans la direction, ils rejoignaient dans 52 % des cas un ministère, dans 20 % un établissement public et dans 12 % le secteur privé.
Un recrutement de contractuels en concurrence avec l’INSP
Comme énoncé plus haut, le tiers de l’encadrement supérieur de la direction du budget est d’origine contractuelle.
À cet égard, la Cour s’interroge sur l’attractivité du concours de l’INSP pour ces profils. Ceux-ci sont souvent bien formés et peu désireux de perdre plusieurs années à préparer, puis suivre, la formation de l’INSP.
Par ailleurs, les contractuels peuvent désormais accéder aux emplois fonctionnels des directions d’administration centrale (autrement dit, aux postes de chefs de bureaux, et par la suite de sous-directeurs).
Un recrutement de contractuels qui soulève aussi une question vis-à-vis des catégories A
La Cour des comptes ne le note pas, mais cette situation crée aussi des inégalités avec les agents de catégorie A qui, pour certains, sont également sortis de grandes écoles (en particulier de Science Po Paris).
Une dizaine d’attachés principaux exercent ainsi des fonctions de chefs de bureau à la direction du budget. Leurs sujétions sont identiques à celles des administrateurs et des contractuels. Toutefois, leur carrière, dans ce corps de catégorie A, s’arrêtera là. En effet, les attachés d’administration, comme les inspecteurs des finances publiques… ne peuvent pas, statutairement, exercer des fonctions d’encadrement supérieur7.
Un fort turnover, facteur de risques pour la gestion des compétences
La part importante de contractuels, qui n’ont pas vocation à « faire carrière » (même s’ils le peuvent), couplé à un taux de rotation également élevé des fonctionnaires, nécessitent une incessante lutte pour conserver un niveau d’expertise approprié.
D’autant que les missions de la direction du budget impliquent des négociations budgétaires avec les ministères et un travail de représentation dans près de 250 conseils d’administration d’opérateurs et assimilés.
« Le taux de rotation annuel des agents de l’administration centrale de la direction est de 43 % pour les cadres A+ fin 2021, ce qui signifie que la durée d’occupation des postes n’est que légèrement supérieure à deux ans, sous-directeurs compris. Près d’un quart des effectifs est renouvelé par recrutement extérieur chaque année. Ce taux de rotation a pour effet de raccourcir le déroulement des carrières et de limiter le retour sur investissement de l’administration centrale puisqu’en moyenne, plus de 70 % des effectifs de la direction y passe moins de cinq ans. »
Une asymétrie dans les carrières proposées à l’encadrement supérieur
« Compte tenu de la rapidité du début de carrière, la direction peut proposer un poste de sous-directeur à des cadres A+ parfois âgés de moins de 35 ans et de retour de mobilité, ce qui peut poser difficulté pour dérouler ensuite une carrière, au même rythme, dans les autres administrations. »
La réflexion s’arrêtera là, encore une fois, et on ne s’interrogera pas sur les perspectives d’autres corps de la direction du budget.
Une tension liée à la formation en interne
Le taux de rotation élevé implique également une charge de travail plus importante pour les agents en poste, pour former les nouveaux arrivants.
Pour favoriser le développement des compétences, la direction encourage les départs en formation. Mais, l’objectif de deux jours par an n’était, à la date du rapport, atteint que par 14 % des agents.
Une autre initiative, plus installée, consiste à développer annuellement des travaux internes prospectifs et stratégiques destinés à réfléchir sur les thématiques budgétaires des bureaux sectoriels8.
Les agents du réseau de la direction du budget
Les onze départements du contrôle budgétaire (DCB) comptaient en 2021 131 agents, auxquels s’ajoutent 22 contrôleurs budgétaires en région (CBR) et en outre-mer.
Une structuration hiérarchique très différente de l’administration centrale
Les agents du DCB et du CBR appartiennent à une structure nettement plus classique, qui se rapprocherait de l’administration déconcentrée ou d’un service à compétence nationale.
On y trouve ainsi « seulement » 17 cadres A+, 78 catégories A, 28 catégories B et 8 agents de catégorie C.
L’âge moyen en DCB était de 51 ans en 2021 et seuls 40 % des agents y restaient moins de cinq années, pour une ancienneté moyenne de 8 ans.
Des postes techniques, plus comptable que budgétaire
Au total, près de 12 500 équivalents temps pleins (ETP) travailleraient sur une fonction de gestion budgétaire et financière au sein de l’État (hors fonctions comptables).
Dans ce cadre, les postes en DCB et CBR constituent des étapes importantes, permettant d’assumer des responsabilités financières dans les ministères ou leurs opérateurs.
Une attractivité moindre
« Les candidatures sont peu nombreuses et émanent essentiellement de la direction centrale et des autres DCB, attestant de la faible attractivité de ces fonctions budgétaires à l’extérieur de ce vivier. »
Les agents ressentent des charges de travail croissantes et moins valorisées dans le cadre de la réforme de la haute fonction publique9. En dépit du reclassement de l’ensemble de ces emplois en experts de haut niveau de groupe II et des revalorisations indemnitaires associées.
Alors que la diversité des compétences est promue par la DGAFP, les agents des CBCM s’inquiètent d’être pénalisés par leur spécialisation.
Ces acronymes désignent les services du contrôle budgétaire et comptable ministériel (comptables et contrôleurs des dépenses placés au sein des secrétariats généraux des ministères) et les contrôleurs budgétaires régionaux, en régions. ↩
Le secrétariat général, créé par arrêté du 15 novembre 2022, regroupe désormais les quatre entités chargées des fonctions supports de la direction (40 agents). ↩
Etant précisé que contrairement aux administrations centrales « classiques », ces agents sont statutairement qualifiés d’ « adjoints ». Cela leur ouvre droit à des indemnités supérieures. ↩
Les contraintes horaires et calendaires mentionnées plus haut. ↩
Il faut aimer Excel, les synthèses de « Jaunes » et les boucles de courriels. ↩
Et, plus spécifiquement, occuper un poste de sous-directeur, conformément au décret n° 2012-32 du 9 janvier 2012 relatif aux emplois de chef de service et de sous-directeur des administrations de l’Etat. ↩
Une réflexion annuelle similaire existe également dans l’autre grande direction financière de l’Etat : la direction de la sécurité sociale. ↩
Une nouvelle fois, bien que les cadres supérieurs ne représentent ici « que » 20 % des effectifs, la Cour sait leur prêter une oreille attentive. ↩
L’un des chapitres de ce rapport est consacré aux moyens humains consacrés aux systèmes d’information1.
On y apprend tout d’abord que les effectifs de la DGFiP consacrés aux services informatiques ont fortement baissé (-13 % de 2013 à 2018), alors que ces effectifs sont restés stables à la DGDDI.
Point de situation
Situation de la direction générale des finances publiques (DGFiP)
« En 2018, la DGFiP compte 4 786 agents affectés aux tâches informatiques pour une masse salariale de 361 millions d’euros. Ces agents représentent 26 % de l’ensemble des effectifs informatiques de l’État, hors ministère des Armées. La DGFiP constitue ainsi la direction d’administration centrale comptant le plus grand nombre d’informaticiens. 70 % d’entre eux sont affectés au sein du réseau territorial du SSI. Près d’un quart travaillent au sein du SSI en administration centrale (24 %), les autres (6 %) relevant du service à compétence nationale Cap Numérique. »
« Les suppressions d’emplois sur la période ont prioritairement porté sur les catégories C et en particulier sur les métiers de moniteur, agent de traitement et dactylocodeur du fait de l’automatisation de processus. »
Par ailleurs, cet effectif est de plus en plus âgé et masculin. La part des agents de plus de 60 ans est ainsi passée de 9 à 12 % sur la période, soit un niveau supérieur à celui de la DGFiP dans son ensemble. Or, la DGFiP présente déjà la moyenne d’âge la plus élevée parmi l’ensemble des administrations centrales.
Situation de la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI)
« En 2018, la DGDDI compte 611 agents informatiques, dont 35 contractuels, représentant une masse salariale de 44 millions d’euros. Entre 2013 et 2018, le nombre d’agents SI a été stable, à l’instar des effectifs globaux de la Douane. »
Parmi les agents des douanes : 60 agents sont en administration centrale, 154 en réseau territorial et le reste dans deux services à compétence nationale :
182 agents au sein du centre informatique douanier et
215 agents à l’intérieur de la Direction nationale des statistiques et du commerce extérieur.
35 % des agents du réseau territorial et des services à compétence nationale sont toutefois consacrés à des missions d’assistance, auprès des usagers (qu’ils soient internes ou externes).
De très grosses difficultés de recrutement
Beaucoup de postes non pourvus
Près de 35 % des postes de programmeurs ouverts durant les trois dernières années n’ont pas été pourvus à la DGFiP. 80% dans les services des douanes pour les postes d’informaticiens de catégorie A et B ouverts en 2018. Ce qui pose, à l’évidence, la question de l’attractivité de l’Etat dans un contexte de forte concurrence du secteur privé.
Par ailleurs, des postes de cadres informaticiens sont vacants sur des longues périodes. Plus de deux ans pour certains postes de chef de pôle, à la DGDDI.
La DGAFP et l’ex-DINSIC ont finalisé en 2019 un plan d’attractivité à cette fin.
« Il convient également de relever que le décret instituant une prime spécifique aux fonctionnaires de l’État et des établissements publics affectés au traitement de l’information n’a pas été revu depuis 1971. Ainsi, la liste limitative des postes ouvrant droit à cette prime n’a pas été actualisée pour prendre en compte les nouveaux métiers créés dans ce domaine comme les data scientists. »
Un recours très faible aux contractuels
En 2018, la DGFiP comptait seulement 111 agents contractuels et la DGDDI 31 agents, soit respectivement 2,3 % et 5 % de leurs personnels informatiques.
Ces flux de recrutement n’ont pas augmenté sur la période2.
« Les deux directions expliquent que les recrutements de contractuels sont difficiles, notamment, pour les métiers où les compétences sont rares (architecte, data miners) car les salaires proposés ne sont pas compétitifs. L’évolution de carrière lente et parfois limitée constitue un obstacle supplémentaire à la DGDDI. D’autres structures du MEF, telles que Tracfin ou l’AIFE, ne sont pas confrontées à d’aussi grandes difficultés. »
Le fait que les emplois proposés soient en CDI3 n’y change rien.
L’une des réponses est la création d’un corps interministériel
En effet, en mai 2015, le ministère de l’Intérieur a profondément transformé le corps des ingénieurs des systèmes d’information et de communication (ISIC)4.
Les ingénieurs des systèmes d’information et de communication exercent des fonctions de conception, de mise en œuvre, d’expertise, de conseil ou de contrôle en matière de systèmes d’information et de communication. À ce titre, ils peuvent exercer des fonctions d’encadrement. Ils sont recrutés et nommés par le ministre de l’Intérieur.
Les difficultés auxquelles sont confrontées la DGDDI et la DGFiP
« Le calendrier actuel des concours constitue un frein au recrutement, notamment pour les postes de programmeurs de catégorie B à la DGFiP dont le nombre de postes non pourvus est le plus important. En effet, sur un marché en tension, les diplômés en juin de l’année N, ne peuvent passer le concours qu’en mars N+1, le résultat de l’admission est connu en juin N+1 et ils commencent à être rémunérés en septembre N+1. Il s’écoule donc plus d’un an entre l’obtention de leur diplôme et leur premier traitement versé par l’administration. »
La Cour préconise de réserver l’examen de la condition de diplôme lors de la constitution du dossier administratif avant le recrutement effectif.
Par ailleurs, à la Douane, les mobilités sont réalisées non pas en fonction des compétences, mais des « points » acquis par les agents – dans un système analogue à celui de l’Education nationale. Or, les services informatiques sont situés à Osny, dans le Val-d’Oise et surtout à Toulouse. Cette dernière ville est attractive, mais elle n’est accessible qu’aux agents les plus anciens, sans égard pour leurs qualifications.
On ne conseillera jamais assez aux candidats de lire les rapports du jury, peu importe le concours visé.
Vous y découvrirez des informations précieuses, sur les attentes du jury, les profils des autres candidats, mais également des perspectives sur les métiers de débouchés des différents concours et examens, ce qui vous permet à la fois de démontrer votre curiosité et de vous projeter sur ces fonctions.
A cet égard, le rapport du comité de sélection interministériel du corps des administrateurs de l’Etat pour 2022 est riche d’enseignements.
Le tour extérieur des administrateurs de l’Etat peut-être considéré comme le véritable concours interne des agents de catégorie A souhaitant exercer des fonctions d’administrateurs de l’Etat.
Au titre de 2022, 38 places étaient à pourvoir, contre 32 places pour le concours interne de l’Institut national du service public (INSP) au titre du même exercice1.
A la différence du concours interne, il n’y a pas une multitude d’épreuves écrites et orales, et surtout, il n’est pas question de deux ans de scolarité à l’INSP, accompagné de trois stages : en affaires internationales, entreprise et préfecture (et autant de déménagements successifs).
Les candidats sont présélectionnés par leurs administrations afin de ne présenter que les agents ayant le potentiel pour exercer des fonctions supérieures et l’épreuve est axée sur un entretien avec le jury autour de la revue des réalisations professionnelles du candidat et de sa capacité à se projeter dans son univers professionnel.
Par ailleurs, la formation est allégée, réduite à six mois, afin de tenir compte de la spécificité des candidats : à savoir des fonctionnaires de catégorie A exerçant déjà des fonctions supérieures et souhaitant changer de corps afin de poursuivre leur ascension professionnelle2.
A l’inverse, et comme le rappelle le dernier rapport du jury relatif au concours interne de l’INSP, le concours interne demeure un concours de début de carrière, permettant en particulier à ceux ayant échoué quelques années plus tôt au concours externe de l’INSP de retenter leurs chances.
Les candidats et lauréats du concours interne sont en grande majorité des hommes (alors même que les femmes sont plus nombreuses que les hommes dans la filière administrative) , ils sont très jeunes3, autour de la trentaine, ne sont évidemment pas sélectionnés par leur administration et doivent préparer des épreuves essentiellement théoriques.
D’abord quelques chiffres
Au titre de 2022, 297 dossiers ont été déposés pour le tour extérieur (contre 241 en 2021) pour un nombre d’emploi à pourvoir de 38. Des chiffres assez similaires au concours interne de l’INSP, avec 302 candidats présents aux épreuves écrites pour 32 places.
Le comité, d’un commun accord, a décidé de ne pas tenir compte des listes préférentielles présentées par les ministères, notamment parce que tous les ministères n’avaient pas établi de telles listes, afin de se doter d’une capacité d’appréciation la plus libre possible, en se fondant exclusivement sur les dossiers de candidature et les prestations orales des candidats.
Pour autant, il convient de préciser que si les évaluations des administrations n’ont pas été retenues par le jury, les candidats présentés sont tout de même ceux sélectionnés par ces dernières. Comme énoncé plus haut, un agent de catégorie A ne peut de sa propre volonté, parce qu’il réunit les critères d’éligibilité, solliciter un entretien devant le comité de sélection.
A l’issue de l’examen, seuls 34 candidats ont finalement été retenus – 4 emplois n’ont donc pas été pourvus. Le fait de ne pas saturer la liste des emplois disponibles témoigne, à l’évidence, de la sélectivité du jury.
Malgré un léger rebond des candidatures, une sélectivité qui demeure tendanciellement en baisse
Premier constat : un rebond des candidatures sur 2022 par rapport à 2021 :
Une sélectivité qui demeure tendanciellement en baisse :
A titre de comparaison, par rapport aux candidats présents aux épreuves d’admissibilité aux écrits, le taux de sélection du concours interne de l’INSP pour 2023 est nettement plus défavorable, à 1 pour 9,4.
Des candidats le plus souvent masculins, d’environ 43 ans, en administration centrale aux ministères de l’Intérieur ou de l’Economie et des finances
En effet, le comité de sélection rappelle la concentration des candidatures au sein de deux ministères : l’Intérieur et l’Economie et les finances (41% des candidats).
Ces candidats sont plus souvent masculins (y compris chez les admis).
L’âge moyen est de 43 ans (contre 42 ans en 2021), avec un plus bas à 36 ans et un plus haut à 51 ans. Près de la moitié des candidats ont entre 40 et 44 ans.
Les attachés demeurent le corps le plus représenté avec près de 80% des candidats et plus de 90% des admis. Parmi les admis : 70% sont attachés principaux d’administration et 20% attachés hors classe.
L’appréciation qualitative des dossiers présentés par les candidats
S’agissant des CV:
Le comité de sélection regrette des présentations médiocres et peu claires. Des éléments inutilement bavards et des présentations complexes rendant la lecture absconde.
Enfin, quelques candidats ont survalorisés des fonctions ou des engagements, ce qui est évidemment peu approprié et se révèle rapidement contreproductif à l’oral.
S’agissant des évaluations des supérieurs hiérarchiques :
Le comité rappelle l’enjeu d’une présentation claire, non ambiguë et si possible harmonisée, a minima au sein d’un même périmètre ministériel. Les candidats devant, de leur côté, être capable d’expliciter les observations.
S’agissant du relevé des acquis de l’expérience professionnelle (RAEP) :
Le RAEP est considéré par le comité de sélection comme « manifestement pas bien compris et (…) très en-deçà des attentes. »
« La présentation doit donc être claire, porter sur une expérience récente, comporter une part descriptive mais dynamique et aussi critique, à la condition qu’elle soit sincère et surtout bien argumentée. Les candidats doivent faire l’effort d’une expression et d’une orthographe correctes, d’une rédaction agréable à lire et, de façon essentielle, s’attacher à capter l’intérêt du lecteur. En synthèse, la RAEP doit permettre au candidat de faire la démonstration qu’il détient une hauteur de vue, des capacités d’analyse et des aptitudes opérationnelles au niveau de ce qui peut être attendu d’un administrateur de l’Etat. »
Or, pour les membres du comité de sélection, le RAEP s’apparente trop souvent à une simple description de fiche de poste sans présentation d’une quelconque problématique ou, à l’inverse, « à une succession de prises de position tranchées et péremptoires ».
S’agissant du parcours professionnel, plusieurs critères permettent de démontrer les capacités d’adaptation des candidats selon les membres du comité, notamment :
L’existence d’une ou plusieurs mobilités entre ministères ou fonctions publiques, ou encore entre différentes structures administratives (centrale, déconcentré, opérateurs) ;
L’occupation de poste dans des domaines fonctionnels différents (juridique, RH, budget) ou de nature différente (fonctions support, mise en œuvre d’une politique publique, tutelle d’opérateur) ;
L’occupation de fonctions d’encadrement ;
Une prise de responsabilité croissante ayant permis d’atteindre : « un niveau hiérarchique suffisant et pouvant se caractériser, sans que cela ne soit une condition exclusive, par l’occupation d’un emploi fonctionnel. »
Evidémment, le comité tient également compte des spécificités propres à chaque ministère s’agissant de la nature et du niveau hiérarchique des postes ouverts aux catégories A.
S’agissant des auditions des candidats
Le comité de sélection note que la première partie de l’entretien (5 minutes), consacré au parcours du candidat, est généralement réussi tant en termes de gestion du temps que de contenu, malgré quelques exposés décousus et peu lisibles (en dépit de l’annonce du plan).
Toutefois, le constat unanime est celui d’un discours trop convenu sur le fond, uniforme et finalement assez ennuyeux.
En revanche, pour la partie relative aux questions, le comité a constaté de véritables lacunes alors même que le comité de sélection s’est, pour l’essentiel, appesanti sur le parcours du candidat : curriculum vitae, évaluations, RAEP.
Le jury est particulièrement sévère sur la capacité des candidats à formaliser un point de vue présentant de la hauteur : « Les candidats ont souvent montré une incapacité à décrire et surtout à situer leur poste ou leurs missions dans leur environnement professionnel ou dans des problématiques de politiques publiques un peu élargis. »
Le comité de sélection note ainsi son incompréhension devant la réaction des candidats à des questions relatives à leurs points forts supposés, tels que mis en avant dans leur dossier d’évaluation (lorsqu’ils en ont un).
Plus encore, le comité de sélection note que : « beaucoup de candidats ont semblé « désemparés » devant des questions portant pourtant sur leur dossier, le choix de postes, le parcours, la mobilité géographique et l’éventuelle prise ou non prise de risque dans leurs sélections de fonctions. »
Enfin, s’agissant de l’échange élargi avec le comité de sélection, les membres dudit comité notent : « un véritable échec. » Ce qui interroge sur les préparations disponibles pour les candidats et sur la capacité de ces derniers à dégager du temps et de l’espace critique pour s’assurer de leur capacité à engager une discussion de haut niveau.
« Le socle minimum de culture administrative, juridique, économique et politique normalement détenu par un administrateur de l’Etat souffre d’une insuffisante préparation de la part des candidats. »
« Pour le comité, ce qui est en cause, c’est l’impréparation, le manque de réflexion et de curiosité mais aussi des imprécisions voire des lacunes importantes sur des connaissances minimales empêchant de bien articuler sa pensée, y compris sur les grands sujets d’actualité du moment, pourtant très largement analysés dans les médias. »
Pour le comité de sélection, il est essentiel que les candidats se renseignent également sur le profil des membres du comité, sur leurs centres d’intérêt naturels ou leurs spécialités.
En bonus, la liste des thématiques pouvant être abordées lors du comité de sélection au tour extérieur des administrateurs de l’Etat :
Je ne peux que vous inciter à reproduire cette liste de questions et à l’adapter au concours ou à l’examen visé. Répondez à chacune d’entre elles, étoffer la liste et vous serez probablement davantage préparé que 90% des candidats, y compris en catégorie A.
Culture administrative :
Qu’est-ce que la souveraineté nationale et comment s’exerce-t-elle ?
Quelles sont les missions du Conseil Constitutionnel ?
Qu’est-ce que le bloc de constitutionnalité ? A quoi sert-il ?
Quelles différences entre un décret en conseil d’Etat et un décret en conseil des ministres ?
Qui exerce le pouvoir réglementaire ?
Qu’est-ce que l’article 49-3 de la Constitution ?
Qu’est-ce que la hiérarchie des normes ?
Quelles sont les missions régaliennes de l’Etat ?
Comment sont organisées les juridictions en France ? Deux ordres sont-ils utiles ?
Qu’est-ce que le Conseil d’Etat ? La Cour de cassation ?
Connaissez-vous des juridictions spécialisées et dans quels domaines ?
Quelles sont les juridictions compétentes en droit du travail ?
Quelles sont les juridictions financières en France ?
Connaissez-vous des juridictions qui emploient des juges non professionnels ? Des citoyens ?
Faut-il juger les ministres ? Qui les juge ? Existe-t-il des procédures en cours ?
Quelles sont les juridictions compétentes en matière pénale ? A quoi sert la cour d’assises ?
Quel est le rôle du parquet ? Parquet siège quelles différences ?
Fallait-il créer un parquet financier ?
Qui juge les terroristes ? Quelle est l’utilité d’un parquet antiterroriste ?
Quelle est la différence entre éthique et déontologie ? Qu’est-ce que la déontologie ? Quelles instances interviennent dans ce domaine ?
Qu’est-ce que l’article 40 du Code de procédure pénale ?
Qu’est-ce qu’une autorité administrative indépendante ? Pouvez-vous en citer ? Leur utilité ?
Les grands principes du droit des collectivités locales ?
L’organisation des collectivités territoriales de l’Île-de-France est-elle efficace ?
Quel est le cadre juridique encadrant les compétences des collectivités locales ?
Les régions ont-elles une clause de compétence générale ?
Quel transfert de compétence est demandé par les régions ?
Fallait-il départementaliser Mayotte ?
La France a-t-elle vraiment sa place outre-mer ? Que lui apporte cette présence ?
Qu’est-ce que la diagonale du vide ?
Quelles sont les conditions de la réussite de la dématérialisation des procédures ?
Qu’est-ce que la fracture numérique ?
Faut-il garder deux forces de sécurité en France, police et gendarmerie ?
Le lien armée Nation ?
Compte tenu de l’actualité géopolitique, pensez-vous qu’il fallait supprimer le service militaire ?
Faut-il continuer à dialoguer avec la Russie ?
Votre avis sur la conception française de la laïcité ? Avez-vous des exemples de politiques françaises de discrimination positive ? Votre avis ?
La politique française de lutte contre le séparatisme est-elle efficace ?
Quelles sont les mesures prises dans l’éducation pour lutter contre la radicalisation ?
Faut-il accueillir les mineurs de retour des zones de terrorisme en Syrie ?
Quels ont été les derniers éléments de modernisation de la formation professionnelle en France ?
A quoi sert la formation continue ?
Qu’est-ce qu’un dialogue social réussi ?
La réquisition est-elle la marque de l’échec du dialogue social ? Quels sont les fondements juridiques de la réquisition ?
Le droit à la paresse
Faut-il supprimer les droits de succession ?
Le prix unique du livre
La loi Toubon : un combat vain ?
Questions économiques, budgétaires et financières :
Quels sont les grands principes qui régissent la commande publique ?
Quels sont les grands principes budgétaires ?
Qu’est-ce qu’une loi financière ? Quelle différence avec la loi ordinaire ?
Quelle différence entre une loi de financement de la sécurité sociale et une loi de finances ?
Quel est le 1er poste de la dépense publique en France ?
Quels sont les principales dépenses du budget de l’Etat ?
Pourquoi faut-il maitriser la dépense publique ?
Le montant de la dette française est-il un problème ?
Quel est le montant de l’excédent budgétaire français ? (question-piège !)
Quelles sont les principales mesures du projet de loi de finances 2023 ?
Quelles sont les principales mesures du projet de loi de financement de la sécurité sociale 2023 ?
Quel sont les atouts de l’économie française ?
Quels sont les maux de l’économie française ?
Comment est gérée l’assurance chômage ?
La fermeture de Fessenheim était-elle opportune ?
Question sur l’Europe :
Pouvez-vous citer quelques institutions de l’Union européenne et leurs missions ?
Quelle différence y a-t-il entre le Conseil européen, le Conseil de l’Union européenne et le Conseil de l’Europe ?
Qu’est-ce que l’espace Schengen ?
Tous les Etats membres de l’UE participent-ils à la zone euro ? Lesquels n’y participent pas ?
Quels sont les principaux actes juridiques contraignants de l’Union européenne ?
Dans quelle mesure le droit de l’Union européenne s’applique-t-il en France ?
Quelles sont les principales caractéristiques du budget de l’Union européenne ?
Faut-il retirer l’anglais de la liste des langues de travail de l’UE ?
L’usage de la langue française dans l’administration française et dans les relations avec l’Union européenne ?
Faut-il réformer le marché européen de l’électricité ?
Questions sur la Fonction publique :
Le statut général de la Fonction publique : sa première qualité et son plus grand défaut ?
La loi de transformation de la Fonction Publique du 6 août 2019 ? Quels en sont les 5 axes ou les grands principes ?
Est-ce que l’ouverture facilitée au recrutement des agents contractuels pour les emplois de direction est de nature à diminuer l’attractivité du corps des administrateurs de l’Etat ?
Quels sont les freins au recrutement des agents contractuels pour les emplois de direction ?
Le statut de fonctionnaire a-t-il encore du sens pour les missions non régaliennes et pourquoi ?
le statut est-il un élément d’attraction ou un frein au recrutement ?
Comment rendre plus attractive la fonction publique ?
Fallait-il supprimer l’ENA ?
Le temps réel de travail des hauts fonctionnaires français est-il un signe d’efficacité ?
La transformation de certains corps du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères pourrait-il avoir des conséquences pour la diplomatie française ?
Dans quelle mesure la crise sanitaire récente a-t-elle été une opportunité de modernisation de la fonction publique française ?
Quelles sont les instances représentatives des personnels dans la fonction publique ?
Qu’est-ce que le devoir de réserve du fonctionnaire ? L’obligation de discrétion ? Le secret professionnel ?
Quel est le rôle actuel des CAP ? Est-ce que les compétences revues des CAP seront de nature à diminuer le rôle des organisations syndicales et d’avoir une incidence sur le taux de participation des élections de décembre ?
Est-ce que le syndicalisme a du sens pour l’encadrement supérieur ?
Existe-t-il un dispositif alternatif pour prendre en compte les aspirations de l’encadrement supérieur en dehors du champ syndical ?
Télétravail et encadrement ?
Un plan égalité a-t-il été mis en place dans votre structure/établissement ?
Comment revaloriser le métier d’enseignant ?
Quels sont les enjeux de la revalorisation des salaires des enseignants ?
Les concours sont-ils toujours la meilleure façon de recruter des enseignants ? A l’image des autres pays européens, faut-il supprimer le statut des enseignants pour créer une profession réglementée ?
Qu’est-ce que Parcoursup ?
Questions diverses :
Comment réagir face à un chef harceleur ?
Comment définir un mauvais chef ? Comment travailler avec lui ?
Qu’est-ce qui vous fait rire ?
Le dernier livre que vous avez lu ? Le dernier film vu ?
Arrêté du 4 août 2022 fixant le nombre de places offertes en 2022 aux concours d’entrée à l’Institut national du service public. ↩
Outre l’aspect professionnel, on peut aussi imaginer que les quarantenaires présentent une structure familiale différente rendant peu opérationnel le concours interne proposé par l’INSP. ↩
Le dernier âge moyen communiqué pour les admis au concours interne de l’Ecole nationale d’administration date de 2020, il était de 32 ans. Malheureusement, à ma connaissance, l’INSP ne communique plus sur cette statistique. ↩
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